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lore du signal. Il y avait en rade deux croiseurs et la division complète des canonnières et des gardes-côtes de Saïgon. De navire en navire des appels de clairons sonnèrent. Les signaux répétés claquaient au bout des mâts.

L’aiguille de la montre passa sur huit heures. Au signe de l’aide de camp, les commandements réglementaires retentirent, solennels :

— Attention pour les couleurs !

— Halez bas le signal !

— L’amiral envoie !

— Envoyez !

Aux coupées, les coups de fusils firent des flocons bleus. La musique joua au drapeau. Les matelots saluèrent en se découvrant, et Fierce ôta son casque, dédaigneux du soleil qui perçait aux transfilages des lentes. — Le pavillon de France montait lentement à la poupe, fier comme au soir d’Austerlitz. — Et Fierce le regarda, et sourit en haussant imperceptiblement les épaules, et murmura sept mots retenus d’un livre qui lui plaisait, par des apparences de sincérité : — Bleu de choléra, blanc de famine, rouge de sang frais. — Il remit son casque et tourna le dos pour descendre chez l’amiral.

M. d’Orvilliers, duc et pair, contre-amiral commandant une division de l’escadre de Chine, était, au physique, un maréchal du Premier Empire, plus haut, plus maigre et plus héroïque que ne sont les hommes d’aujourd’hui, et durci d’une moustache grise plus rude, et de cheveux blancs plus épais ; mais ses yeux,