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chap. xiii. — positions fortes, camps retranchés.

contre les mouvements tournants. Une semblable manœuvre, en effet, offre toujours un certain danger pour celui qui l’exécute, et ce danger croît à mesure que le mouvement tournant éloigne davantage l’attaque de sa direction première.

À cette époque, un front qui avait une grande étendue et de bons points d’appui permettait donc de protéger directement de l’invasion une importante portion de territoire ; ce sont là du moins les considérations qui présidèrent à la création de ces longues lignes, telles que celles d’Alsace, dont nous venons de parler, et celles de Flandre. Ces dernières avaient 15 milles (110 kilomètres) d’étendue, et s’appuyaient par leur droite à l’Escaut et à la forteresse de Tournay, et par leur gauche à la mer.

Là où l’on n’est pas en état de se couvrir par un front si long et si fort soutenu par d’aussi solides points d’appui, alors qu’il importe néanmoins de se maintenir en possession de la contrée au moyen de forces militaires bien retranchées, il convient de mettre celles-ci à l’abri des mouvements tournants de l’ennemi en les plaçant dans une position qui fasse front de tous côtés. Il est certain qu’il ne saurait être question ici de couvrir matériellement un espace étendu, car, au point de vue stratégique, une semblable position ne constitue qu’un point, et ce ne peut plus être que les troupes elles-mêmes qui, protégées par la position qu’elles occupent, réalisent la possibilité de se maintenir en possession de la contrée ou, ce qui revient au même, de se maintenir sur la contrée. Un pareil camp ne peut plus être tourné, car, n’ayant ni flancs ni derrières, il n’offre pas de parties plus spécialement favorables à l’attaque ; il fait front dans toutes les directions et possède partout la même force, mais, par contre, on peut passer à côté, et cela beaucoup plus facilement à la vérité que s’il