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au soir de la pensée

de l’arbre et les répétitions des gymnastiques qui en furent la condition nécessaire. C’est que le rapprochement s’impose à nous de l’héliotropie des végétaux dont le pédoncule se tord sous l’action du soleil, en orientant la fleur vers la source de lumière, aussi bien que du redressement animal qui relève le regard du quadrumane de la terre à l’astre dominateur.

On connaît les effets manifestes de l’action solaire sur les plantes et sur les animaux, selon un mécanisme résultant des activités physico-chimiques provoquées par l’action solaire. Il n’est pas besoin de remonter juqu’aux magnifiques études de Ch. Darwin sur la motricité dans les plantes pour y retrouver les signes de l’héliotropie chez les animaux. L’ancienne séparation étanche de l’animal mobile et du végétal immobile s’est évanouie décidément. Aux limites du monde animal et du monde végétal, où des sujets, classés végétaux, se sont vus plus tard élever au rang de l’animalité, la distinction fut parfois laborieuse. Rien ne dit mieux le contraste de nos classements subjectifs (qui changent avec le progrès des connaissances) dans l’objective continuité des mouvements élémentaires. C’est ce qui faisait dire à Claude Bernard que les plantes en possession de la motilité dans une direction déterminée offraient les apparences du mouvement volontaire. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire avait déjà attribué des mouvements automatiques aux uns et aux autres. Il n’y a guère là qu’une question de mots, la volonté elle-même étant d’automatisme, au sens ou ce phénomène se range sous la dépendance des lois cosmiques par lesquelles il est engendré.

Ce que j’en peux dire, d’abord, c’est qu’il faut remplacer le terme : « Mouvements déterminés par la lumière » par la formule « phénomènes d’héliotropie » qui implique toutes les formes d’activités de l’énergie solaire — lumière, chaleur, électricité, etc. Encore y devons-nous comprendre la mise en œuvre, chez les végétaux, du tropisme signalée par Claude Bernard, à savoir que l’extrémité de la radicule douée des organismes de sensibilité nécessaires à l’action du géotropisme[1] agit comme ferait un être intelligent. « Il est à peine exagéré de dire que la pointe radiculaire ainsi douée et possédant le pouvoir de diriger les parties voisines,

  1. La Naissance de l’intelligence, Georges Bohn.