Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nant une nouvelle vigueur au moral et au physique, leur inspire en même temps une nouvelle ardeur. C’était par un jour semblable que la garnison d’Oswego s’était rassemblée pour voir ce que son commandant avait appelé en plaisantant « une passe d’armes. » Lundie était un homme instruit, — du moins dans sa profession, — et il se faisait un plaisir de diriger l’esprit des jeunes gens qui étaient sous ses ordres vers les lectures les plus convenables à l’état qu’ils avaient embrassé. Il avait une bibliothèque bien choisie et assez considérable pour la situation dans laquelle il se trouvait, et il prêtait volontiers ses livres à tous ceux qui le désiraient. Entre autres fantaisies que ces lectures avaient introduites dans la garnison, était un goût pour cette sorte d’amusement qui allait avoir lieu, et auquel quelques chroniques du temps de la chevalerie avaient donné une teinte romanesque qui était assez en harmonie avec l’humeur et les dispositions de soldats en garnison dans un fort isolé, situé dans un pays éloigné et sauvage. Mais tandis que la plupart ne songeaient qu’au plaisir, ceux qui étaient chargés de ce devoir ne négligeaient pas la sûreté du poste. Un homme placé sur les remparts du fort, et regardant cette vaste étendue d’eau tranquille et brillante qui bornait la vue du côté du nord, et la forêt paisible et en apparence sans bornes qui formait l’autre côté de ce panorama, se serait cru dans un séjour de paix et de sécurité. Mais Duncan de Lundie ne savait que trop que les bois pouvaient à chaque instant faire paraître plusieurs centaines de sauvages résolus à détruire le fort et à massacrer tout ce qui s’y trouvait, et que les eaux du lac offraient un chemin facile par lequel des ennemis plus civilisés, mais presque aussi astucieux, les Français, pouvaient approcher du fort à l’improviste. Il envoya donc des détachements, commandés par des vétérans qui se souciaient peu des plaisirs de la journée, faire des patrouilles dans la forêt, et une compagnie entière resta sous les armes dans le fort, comme si l’on eût su qu’un ennemi de force supérieure était dans les environs. Avec ces précautions, les autres, tant soldats qu’officiers, ne songèrent plus qu’aux plaisirs que leur promettait cette matinée.

L’endroit qui devait être la scène du divertissement était une sorte d’esplanade sur le bord du lac, un peu à l’ouest du fort. On avait choisi ce terrain pour y faire la parade, parce qu’il avait l’avantage d’être protégé en arrière par le lac, et sur un de ses