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autrement éphémère. Fondé en 439, il succomba dès 534 sous les coups des armées de Justinien. On peut s’étonner que les Vandales aient quitté pour courir l’aventure africaine les délices de la plaine de Séville. Mais leur jeune chef Genséric y trouvait sans doute son ambition à l’étroit. Et d’ailleurs ils pouvaient compter sur une proie facile. N’étaient-ils pas appelés par Boniface qui gouvernait l’Afrique au nom de l’empereur Théodose II et qui, tombé en disgrâce et révolté, avait résolu de s’y rendre indépendant. Pris à partie par l’illustre évêque d’Hippone, Augustin, et ramené par lui au sentiment de son devoir, Boniface se repentit bientôt de sa trahison et s’empressa d’organiser la résistance contre les barbares qu’il avait lui-même incités à franchir le détroit. La lutte fut longue et ardente. Les Vandales l’emportèrent. En 439 Genséric s’étant emparé de Carthage, en fit sa capitale.

Avant de voir passer aux Vandales puis aux Arabes cette Afrique du nord que les Romains avaient arrachée aux Carthaginois, il convient de rappeler comment ils s’y étaient comportés et ce qu’ils en avaient fait. Leur installation s’y était accomplie lentement et non sans méfiance. Les Carthaginois, comme nous l’avons vu, n’avaient eux-mêmes jamais ambitionné une vaste extension de territoire. Leur puissance toute maritime s’était tenue presqu’en bordure de la côte et ils ne s’étaient point avisés de vouloir dompter les indigènes. Ceux-ci qu’on appelait Numides appartenaient à une race unique dont le langage, avec quelques différences de vocabulaire et de prononciation, est encore parlé dans toute l’étendue du Sahara, sur les bords du Niger comme au Sénégal. Son étrange alphabet se retrouve en des inscriptions rupestres éparses jusqu’aux Canaries d’un côté, et de l’autre, jusqu’au pied du Sinaï. Les Numides d’autrefois, ce sont les Berbères actuels et leur portrait est si nettement tracé par les historiens latins que nous n’avons guère d’hésitation à les reconnaître. Plus ou moins nomades mais vivant toujours par petits groupes indépendants, leur incapacité à combiner des efforts persévérants leur enlevait la possibilité de s’opposer à l’envahissement d’armées organisées. Il arrivait parfois pourtant qu’un de leurs chefs prit assez d’ascendant pour établir un pouvoir un peu centralisé et le maintenir quelque temps. Tel avait été le cas de Massinissa, homme d’une trempe exceptionnelle qui à quatre-vingt huit ans montait encore à cheval sans selle et continuait de guerroyer avec une vigueur indomptable. De Cirta (maintenant Constantine) sa capitale, il n’avait cessé de harceler Carthage et il avait aidé grandement les Romains à l’abattre. Ceux-ci l’ayant