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à travers l’histoire sud-américaine

Or en peu de temps la fortune tourna. Bolivar, qui jamais ne fut plus grand que dans cette occurence, demeurait indomptable. Chassé de Carthagène, sa dernière forteresse, il put à la Jamaïque, avec la tolérance anglaise, préparer une nouvelle expédition. Et ce fut cette fois par l’Orénoque qu’il pénétra dans sa patrie. D’Angostura devenue à la fois quartier général et siège de gouvernement, il tint la campagne avec une sombre énergie. Les llaneros, ces bouviers de la pampa, cavaliers incomparables et combattants farouches d’abord enrôlés par les royalistes, leur avaient récemment fauseé compagnie et se rangeaient maintenant sous les drapeaux du Libérateur. D’autre part, le Congrès de Tucuman, le 9 juillet 1816, avait proclamé l’indépendance des provinces unies du Rio de la Plata. Ainsi l’aurore de la liberté s’annonçait derechef.

Deux faits se passèrent alors qu’aucun manuel d’histoire ne devrait ignorer parce qu’ils furent aussi grands par la conception que par l’exécution et par le risque que par le résultat. En janvier 1817, avec une audace magnifique, le général San Martin, parti de Mendoza à la tête de quelque 3 500 hommes, franchit les Andes par le col d’Uspalata (haut de près de 4 000 mètres), descendit vers le Pacifique et ayant défait les royalistes entra à Santiago et assura l’indépendance du Chili, qui fut proclamée le 1er  janvier 1818. Dix-huit mois plus tard, Bolivar, après avoir consolidé sa situation, se dirigea à son tour à marches forcées d’Angostura vers la Nouvelle-Grenade, et, ayant accompli en pleine saison des pluies la traversée terrible des Andes, s’empara de Bogota le 10 août 1819. Peu après le Venezuela et la Nouvelle-Grenade étaient déclarés unis sous le nom de République de Colombie.

Il ne restait plus à conquérir que le Pérou proprement dit. À Lima, le vice-roi et ses soldats résistaient encore. Ils espéraient des renforts envoyés par la métropole. Mais les vingt mille hommes réunis à cet effet par Ferdinand VII