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MAURICE COURANT.

En opposition avec la lettre de la loi et l’opinion de l’aristocratie, il faut remarquer que plusieurs rois ont fait des aumônes importantes aux bonzeries, que Htai-tjo, 太祖, a fondé celle de Syek-oang, 釋王寺, près de Ouen-san, 元山, et Tjyeng-tjong, 正宗, celle de Ryong-tjyou, 龍珠寺 (1795) dans le district de Syou-ouen, 水原, auprès du tombeau de son père et du sien propre. Lors de l’invasion de la Corée par les Japonais (1592-1598), quelques bonzes se mirent à la tête de leurs confrères et luttèrent courageusement contre l’étranger ; à cette époque, remonte l’institution des bonzes militaires qui dépendent du Ministère de l’Armée et sont chargés de garder les citadelles de Peuk-han, 北漢, et de Nam-han, 南漢, au nord et au sud de Seoul. De même, l’abbé de Ryong-tjyou-să est pourvu d’un titre civil important[1]. Un bonze, You-tjyeug, 惟政 (ou Sa-myeng, 四淇) fut chargé des négociations avec le Japon (1604) et prépara la conclusion du traité qui régla les relations des deux pays jusqu’en 1876.

Dans la campagne, les bonzeries sont nombreuses, quelques-unes fort importantes, d’autres très misérables ; le peuple les fréquente volontiers et leur donne des aumônes. Il connaît d’ailleurs à peine la religion et n’a pas des bouddhas une autre idée que des esprits qu’il fait exerciser par les sorcières, sinon qu’il voit dans les premiers des protecteurs et que, parmi les autres esprits, il en reconnaît de bons et de mauvais. Les bonzes eux-mêmes sont si ignorants qu’ils sont incapables d’instruire les fidèles. Pour ne pas les juger trop sévèrement, il faut songer à l’état d’abjection où ils sont maintenus depuis plus de trois siècles, et ne pas oublier le rôle qu’ils ont joué au temps du Sin-ra : ce sont eux qui ont introduit les arts de la Chine, l’écriture et la civilisation.

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