Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/77

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Elle commença par revenir vers l’emplacement du foyer éteint, qu’il importait avant tout de rallumer. Elle récolta dans la neige des écorces de bouleau desséchées, dont elle forma une petite pile, en les entremêlant aux bûchettes noires, non consumées. Puis elle rentra dans la tente pour y quérir des allumettes.

Pierre Radisson avait coutume d’en emporter sa provision dans une boîte imperméable, qu’il plaçait dans une poche intérieure de son vêtement de peau d’ours. Et Jeanne se reprit à sangloter, tandis qu’agenouillée devant son père, elle fouillait, à la recherche de cette boîte.

L’ayant trouvée, elle fit fuser bien haut la flamme bienfaisante et rechargea le feu avec une partie des grosses bûches dont Pierre avait fait provision. La chaleur la réconforta et lui rendit courage. Quinze milles… le fleuve qui conduisait à la cabane… Il lui fallait couvrir cette distance avec bébé et avec Loup.

Son attention se reporta vers le chien. Elle dégela, à la chaleur du foyer, un morceau de viande qu’elle donna ensuite à manger à Kazan, puis fit fondre, pour son propre usage, un peu de neige pour le thé. Elle n’avait pas faim et n’éprouvait nulle envie des aliments. Mais elle se rappela que son père la contraignait à manger, cinq ou six fois par jour, si peu que ce fût afin qu’elle ne perdît point ses forces. Elle s’astreignit donc à déjeuner d’un biscuit et d’une tartine de pain, qu’elle arrosa d’autant de thé brûlant qu’elle en put absorber.

Maintenant l’heure terrible était arrivée. Jeanne enveloppa dans des couvertures, étroitement serrées, le corps de Pierre Radisson, et les lia fortement avec une babiche.

Puis elle empila sur le traîneau, près du feu, les autres couvertures et les fourrures, y fit un lit moelleux