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centre qui relie toutes les œuvres particulières, et les rattache au Saint-Siége.

Dans ce travail général de réorganisation, la Corée ne pouvait être oubliée. Plusieurs fois déjà, la Sacrée Congrégation avait discuté le meilleur moyen de venir au secours de ces pauvres chrétiens délaissés, et privés de tout secours religieux. Mais la position déplorable de la mission-mère de Péking, les prétentions surannées du Portugal à un patronage dont jamais nation chrétienne n’est devenue si indigne, avaient empêché de donner à cette question une solution définitive, lorsque, en 1827, arriva à Rome une nouvelle lettre des néophytes de Corée, suppliant instamment le Souverain Pontife de leur envoyer des prêtres. C’était la lettre écrite vers 1825, par Augustin Niou Iong-sim-i, et, comme il est d’usage en pareil cas chez les chrétiens, signée, par mesure de prudence, d’un nom peu connu ou complètement imaginaire. Nous en donnons ici la plus grande partie.


Au Pape, notre Souverain Pontife, les Coréens chrétiens, Ambroise et les autres, salut et vénération profonde.

« Depuis dix-huit cents ans que le Sauveur Jésus, s’étant incarné, a racheté le monde, est ressuscité et est monté au ciel, toujours il s’est trouvé des saints et des docteurs pour porter l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre, et éclairer ceux qui étaient assis dans les ténèbres. Notre pays a eu, lui aussi, malgré son abjection, le bonheur d’entendre la parole de vie, de recevoir la grâce de la réconciliation, et de participer aux mérites de la passion et aux trésors de la miséricorde dix mille fois infinie du Seigneur. N’est-il donc pas de notre devoir de lui rendre d’incessantes actions de grâces ? Néanmoins nous sommes sous le poids de souffrances et de tribulations qu’il est nécessaire d’exposer humblement à Votre Sainteté, afin qu’elle daigne y pourvoir.

« Après la mort du prêtre Jacques Tsiou, dans le royaume de Kaoli (Corée), des persécutions continuelles ayant arrêté les progrès de la doctrine chrétienne, il ne se trouve plus guère que mille fidèles qui se la transmettent dans l’ombre, et continuent à la professer[1]. Cependant les dogmes de la religion, quelque vrais qu’ils soient, deviennent inutiles ; la doctrine, par suite de

  1. Il y a évidemment ici une erreur de chiffres, soit dans la copie chinoise, soit dans la traduction latine, puisque, pendant la persécution de 1827, deux ans après la date probable de cette lettre, nous avons vu qu’il y eut cinq cents arrestations de chrétiens dans deux provinces seulement. D’ailleurs on lit, quelques lignes plus bas, que les chrétiens étaient aussi nombreux qu’au temps du P. Tsiou.