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frent, depuis plusieurs mois, un long martyre. Mon âme est consacrée au Seigneur ; si dans cette belle circonstance je puis entrer en possession de mon Jésus bien-aimé, ne vous affligez pas de mon bonheur ; rendez-lui en plutôt mille actions de grâces. Je vous ai toujours aimés, toujours chéris tandis que j’étais sur la terre : soyez certains que je ne vous oublierai pas, si Dieu me fait la grâce d’entrer au ciel par la porte du martyre.

« Mes très-chers père, mère, frères, sœurs, parents et amis, comme c’est probablement la dernière lettre que j’ai l’honneur de vous écrire, agréez mes derniers adieux. Par la grâce de Dieu, je ne possède ni or ni argent, mais seulement quelques habits nécessaires que m’a procurés la charité des fidèles ; mes dispositions testamentaires sont donc toutes faites.

« Mille actions de grâces à la divine Providence qui m’a appelé à cette mission bénie, pauvre en biens de ce monde, mais fertile en croix. Il faut partir ; je ne puis vous écrire plus au long. Si j’ai l’occasion de vous écrire avant qu’on nous fasse mourir, je le ferai bien volontiers.

« En attendant de vous voir au ciel, où je vais vous attendre, aimez de toute votre âme, de toutes vos forces, le Seigneur notre Dieu ; aimez-vous mutuellement ; aimez aussi le cher prochain comme vous-même, et infailliblement vous aurez le bonheur de vous trouver au rendez-vous. J’ai l’honneur d’être avec le plus sincère attachement, dans les saints cœurs de Jésus et de Marie,

« Votre très-humble et tout dévoué fils.
« Jacques-Honoré Chastan, miss. apost. »


Les deux missionnaires, réunis de nouveau, se préparèrent à obéir à l’invitation de leur évêque. Ils écrivirent chacun une lettre aux chrétiens qu’ils avaient évangélisés, pour les consoler, les affermir dans la foi, et leur faire les diverses recommandations réclamées par les circonstances. Sur ces entrefaites, arriva la seconde lettre de Mgr Imbert qui avait été remise à Pierre Tseng. C’était la répétition de la première. « J’ai possédé nombre d’années, écrit Mgr Verroles, ce précieux autographe que je gardais dans mon diurnal ; un pieux larcin, fait par une main inconnue, m’en a privé. Il était en latin, et ainsi conçu : « In extremis bonus pastor dat vitam pro ovibus ; undè si nondum profecti estis, venite cum prœfecto Son-kie-tsong, sed nullus christianus vos sequalur. Imbert, Episcopus Capsensis. — Dans les cas extrêmes, le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis ;