Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/166

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homme laborieux n’a point de goût plus vif que celui du travail ; un pareſſeux, un libertin trouvent toujours des raiſons pour ne rien faire.

J’ay connu des gens à qui le bien de leur famille auroit éxigé qu’on fermât l’entrée des Temples. Leur pareſſe empruntoit le voile du zele & de la piété pour autoriſer leur fainéantiſe, ils avoient toujours des Indulgences à gagner dans l’Égliſe du Patron du jour, un grand Prédicateur à entendre, un Confeſſeur à viſiter. N’abuſe-t-on pas des meilleures choſes, & le vice n’eſt il pas trop adroit à ſe forger des excuſes ?

Vous vous trompez ſi vous croiez les ſpectacles préjudiciables par la nature des occupations qu’ils interrompent. Il eſt non ſeulement bon pour occuper des oiſifs & des pareſſeux qui n’interrompent leurs occupations que parce que le travail leur déplait ; mais il eſt bon encore pour amuſer les gens ſages & laborieux parce que le ſpectacle eſt en effet un délaſſement & que le plaiſir qu’il procure n’altere les forces ni du corps ni de l’eſprit, comme la plûpart des autres plaiſirs que vous indiquez. Un Artiſan, un Marchand, un homme de Cabinet n’ont pas envie de danſer à la fin de leur journée.

Le vin, les exercices violens, les femmes ne peuvent gueres convenir à des gens exténués de fatigue & ſûrement leur ſanté ſouffriroit de ce qu’ils ſeroient bornés à ces amuſemens, après un travail fatiguant &