Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/221

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ſûr de l’impuiſſance de Genêve à ſoutenir un ſpectacle. Quelle meilleure raiſon que l’impoſſibilité de paier pour ne pas faire de la dépenſe : quelle raiſon plus capable d’éloigner les Comédiens vos ennemis des baſtions de Genêve, que la certitude d’être mal paiés, s’ils oſoient former un établiſſement dans cette ville ? Je ne crois pas le Sénat de Genêve plus dispoſé à tromper les Comédiens en les appellant, que les Comédiens à périr d’inanition en s’établiſſant dans un deſert. Si vôtre allegation vous eut paru vraie elle vous auroit ſemblé en même tems la meilleure & la ſeule utile parmi toutes celles que vous emploiez. Il vous a donc fallu imaginer bien d’autres motifs de dégoûts pour engager vos Compatriotes à nous fermer les portes de Genêve. Vous vous êtes donc aſſis à côté du grand Sulli ; vous avez emprunté ſon ton & ſon ſtile pour dreſſer un Catalogue d’obſtacles imaginaires, d’inconvéniens frivoles & de conſeils économiques que vous prétendez qu’il auroit donné à Genêve pour en écarter les ſpectacles. Croiez moi M. on ſe ſeroit moqué de lui chez vous, comme on l’auroit fait à Paris, ſi les objets qu’il a traités ſi gravement euſſent été des détails auſſi puérils que ceux que vôtre petite politique vous fait regarder comme des monſtres.

Sulli n’auroit vû dans les ſpectacles que ce que tous les gens ſages y voient, un délaſſement utile & néceſſaire, le ſeul digne d’occuper des gens ſenſés & de leur faire moins