Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/71

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Là le Grec né moqueur par mille jeux plaiſans
Diſtilla le venin de ſes traits médiſans.
Aux accès inſolens d’une bouffonne joye,
La ſageſſe, l’eſprit, l’honneur furent en proye,
On vit par le Public un Poëte avoué
S’enrichir aux dépens du mérite joué.
Et Socrate par lui dans un Choeur de Nuées
D’un vil amas de peuple attirer les huées,
Enfin de la licence on arréta le cours,
Le Magiſtrat des loix emprunta le ſecours,
Et rendant par édit les Poëtes plus ſages
Deffendit de marquer les noms ni les viſages,
Le Théatre perdit ſon antique fureur,
La Comédie apprit à rire ſans aigreur :
Sans fiel & ſans venin ſçut inſtruire & reprendre,
Et plut innocemment dans les vers de ménandre.

C’eſt la même choſe que la Police a produit à Paris, elle a proſcrit les ſatyres atroces d’Ariſtophane & n’y ſouffre plus que la ſage critique de Ménandre.

C’eſt le Public, dites vous, qui fait la loi au Théatre & non pas le Théatre qui la fait au Public ; quoi de plus juſte & de plus ſenſé : n’eſt ce pas au goût général, que les particuliers raiſonnables doivent ſe ſoumettre ? » Non, direz vous en ſtile Cinique, il convient d’être ſeul de ſon parti, quand on eſt ſeul raiſonnable ; » j’en conviens mais quand le Public eſt ſage, il eſt beau ſans doute d’ê-