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  Résumé. 351

sifier les formes organiques par les indices qu’elle leur a fournis. La stérilité varie chez les individus d’une même espèce en vertu de prédispositions innées, et elle est extrêmement sensible à l’influence des conditions favorables ou défavorables. Le degré de stérilité ne correspond pas rigoureusement aux affinités systématiques, mais il paraît obéir à l’action de plusieurs lois curieuses et complexes. Les croisements réciproques entre les deux mêmes espèces sont généralement affectés d’une stérilité différente et parfois très inégale. Elle n’est pas toujours égale en degré, dans le premier croisement, et chez les hybrides qui en proviennent.

De même que, dans la greffe des arbres, l’aptitude dont jouit une espèce ou une variété à se greffer sur une autre dépend de différences généralement inconnues existant dans le système végétatif ; de même, dans les croisements, la plus ou moins grande facilité avec laquelle une espèce peut se croiser avec une autre dépend aussi de différences inconnues dans le système reproducteur. Il n’y a pas plus de raison pour admettre que les espèces ont été spécialement frappées d’une stérilité variable en degré, afin d’empêcher leur croisement et leur confusion dans la nature, qu’il n’y en a à croire que les arbres ont été doués d’une propriété spéciale, plus ou moins prononcée, de résistance à la greffe, pour empêcher qu’ils ne se greffent naturellement les uns sur les autres dans nos forêts.

Ce n’est pas la sélection naturelle qui a amené la stérilité des premiers croisements et celle de leurs produits hybrides. La stérilité, dans les cas de premiers croisements, semble dépendre de plusieurs circonstances ; dans quelques cas, elle dépend surtout de la mort précoce de l’embryon. Dans le cas des hybrides, elle semble dépendre de la perturbation apportée à la génération, par le fait qu’elle est composée de deux formes distinctes ; leur stérilité offre beaucoup d’analogie avec celle qui affecte si souvent les espèces pures, lorsqu’elles sont exposées à des conditions d’existence nouvelles et peu naturelles. Quiconque expliquera ces derniers cas, pourra aussi expliquer la stérilité des hybrides ; cette supposition s’appuie encore sur un parallélisme d’un autre genre, c’est-à-dire que, d’abord, de légers changements dans les conditions d’existence paraissent ajou-