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436 Distribution géographique.  

nes peuvent résister à l’action nuisible de l’eau de mer. Je trouvai, à ma grande surprise, que, sur quatre-vingt-sept espèces, soixante quatre ont germé après une immersion de vingt-huit jours, et que certaines résistèrent même à une immersion de cent trente-sept jours. Il est bon de noter que certains ordres se montrèrent beaucoup moins aptes que d’autres à résister à cette épreuve ; neuf légumineuses, à l’exception d’une seule, résistèrent mal à l’action de l’eau salée ; sept espèces appartenant aux deux ordres alliés, les hydrophyllacées et les polémoniacées, furent toutes détruites par un mois d’immersion. Pour plus de commodité, j’expérimentai principalement sur les petites graines dépouillées de leur fruit, ou de leur capsule ; or, comme toutes allèrent au fond au bout de peu de jours, elles n’auraient pas pu traverser de grands bras de mer, qu’elles fussent ou non endommagées par l’eau salée. J’expérimentai ensuite sur quelques fruits et sur quelques capsules, etc., de plus grosse dimension ; quelques-uns flottèrent longtemps. On sait que le bois vert flotte beaucoup moins longtemps que le bois sec. Je pensai que les inondations doivent souvent entraîner à la mer des plantes ou des branches desséchées chargées de capsules ou de fruits. Cette idée me conduisit à faire sécher les tiges et les branches de quatre-vingt-quatorze plantes portant des fruits mûrs, et je les plaçai ensuite sur de l’eau de mer. La plupart allèrent promptement au fond, mais quelques-unes, qui, vertes, ne flottaient que peu de temps, résistèrent beaucoup plus longtemps une fois sèches ; ainsi, les noisettes vertes s’enfoncèrent de suite, mais, sèches, elles flottèrent pendant quatre-vingt-dix jours, et germèrent après avoir été mises en terre ; un plant d’asperge portant des baies mûres flotta vingt-trois jours ; après avoir été desséché, il flotta quatre-vingt-cinq jours et les graines germèrent ensuite. Les graines mûres de l’Helosciadium, qui allaient au fond au bout de deux jours, flottèrent pendant plus de quatre-vingt-dix jours une fois sèches, et germèrent ensuite. Au total, sur quatre-vingt-quatorze plantes sèches, dix-huit flottèrent pendant plus de vingt-huit jours, et quelques-unes dépassèrent de beaucoup ce terme. Il en résulte que 64/87 des graines que je soumis à l’expérience germèrent après une immersion de vingt-huit jours, et que 18/94 des plantes à fruits mûrs (toutes n’appartenaient pas aux mêmes espèces