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CONSIDÉRATIONS

de la liberté aux avantages dont ils jouissoient personnellement. Dans tous les pays où l’aristocratie est dominante, ce qui abaisse la nation place d’autant plus haut quelques individus, qui réunissent les habitudes d’un rang élevé aux lumières acquises par le travail et la réflexion. Mais il est trop cher de comprimer l’essor de tant d’hommes, pour qu’une minorité de la noblesse, telle que MM. de Clermont-Tonnerre, de Grillon, de Castellane, de la Rochefoucauld, de Toulongeou, de la Fayette, de Montmorency, etc., puisse être considérée comme l’élite de la France ; car, malgré leurs vertus et leurs talents, ils se sont trouvés sans force à cause de leur petit nombre. Depuis que l’assemblée délibéroit à Paris, le peuple exerçoit de toutes parts sa puissance tumultueuse ; déjà les clubs s’établissaient, les dénonciations des journaux, les vociférations des tribunes égaroient tous les esprits ; la peur étoit la funeste muse de la plupart des orateurs ; et, chaque jour, on inventoit de nouveaux genres de raisonnemens et de nouvelles formes oratoires pour obtenir les applaudissemens de la multitude. Le duc d’Orléans fut accusé d’avoir trempé dans la conspiration du 6 octobre ; le tribunal chargé d’examiner les pièces de ce procès ne