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CONSIDÉRATIONS

les habitudes des cours quelque chose qui perpétue la légèreté d’esprit jusque dans l’âge avancé ? Il en résulte souvent de la grâce ; mais elle coûte bien cher dans les temps sérieux de l’histoire.

La première proposition que l’on soumit au corps législatif, fut la suspension de la liberté de la presse. Le ministre chicana sur les termes de la charte, qui étoient les plus clairs du monde ; et les journaux furent remis à la censure. Si l’on croyoit que les gazettes ne pouvoient être encore abandonnées à elles-mêmes, au moins falloit-il que le ministère, s’étant rendu responsable de ce qu’elles contenaient, soumît la direction de ces journaux, devenus tous officiels par le seul fait de la censure, à des esprits sages qui ne permissent dans aucun cas la moindre insulte à la nation françoise. Comment un parti évidemment le plus faible à un degré que le fatal retour de Bonaparte n’a que trop manifesté ; comment ce parti prend-il envers tant de millions d’hommes le ton prédicateur d’un jour de jeûne ? Comment leur déclare-t-il à tous qu’ils sont des criminels de divers genres, de diverses époques, et qu’ils doivent expier, par l’abandon de toute prétention à la liberté, les maux qu’ils ont causés en s’efforçant de l’obtenir ? Je crois qu’en vérité les écrivains de ce