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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

décrit elle-même autour de cet astre, dans un temps plus ou moins long. Le mouvement que chacune attribuera au Soleil sera différent, mais également simple ; au lieu que si la Terre est immobile au centre du monde, que le Soleil décrive réellement l’écliptique, et que la Terre soit le centre commun, chacune des planètes décrira une courbe différente, qui aura ses nœuds et ses points d’intersection ; le mouvement qu’elle attribuera au Soleil aura la même complication ; enfin, le système ancien ne convient qu’à la Terre seule, et il présente des bizarreries inexplicables ; celui de Copernic est universel : il convient également à toutes les planètes ; tous les mouvemens ont les mêmes lois et la même simplicité.

Par cet arrangement, Copernic supprime tout d’un coup les épicycles que Ptolemée était forcé de donner aux planètes ; les stations et les rétrogradations de chacune d’elles, vues des cinq autres, deviennent des corollaires mathématiques de leurs différens rayons et de leurs mouvemens inégaux. Toutes les parties du système sont liées, les rapports mutuels sont déterminés, toutes les distances sont ramenées à une même échelle ; au lieu que dans l’ancien système, tout était incohérent et vague. On pouvait à son gré éloigner ou rapprocher chacune des planètes, sans s’imposer d’autre loi que de ne point intervertir l’ordre des distances, en mettant plus près du centre commun la planète dont la révolution zodiacale est la plus longue ; à cela près tout était arbitraire.

Ces avantages du système de Copernic étaient déjà de la plus grande importance. Jamais les anciens n’en ont eu le moindre soupçon, ou s’ils les ont connus, il est bien incroyable qu’aucun d’eux n’en ait parlé. Comment concevoir que les Pythagoriciens eussent négligé de les faire valoir, à l’appui de leurs raisons métaphysiques, du lieu le plus honorable et de la partie la plus précieuse ? Ces raisons mathématiques auraient-elles manqué d’obtenir l’assentiment d’Archiméde, d’Hipparque, de Ptolémée et de tous les géomètres de la Grèce. Pour faire triompher le nouveau système, des préjugés les plus invétérés, que fallait-il, sinon l’exposer dans tous ses détails et avec tous ses avantages. Voilà ce qui était impossible avant Ptolémée ; voilà ce que n’ont pu faire, ni Aristarque, ni Philolaus, ni Séleucus, puisqu’ils n’avaient point de tables des mouvemens planétaires ; voilà l’obligation que nous avons à Copernic. Telle est la partie brillante de son système ; le reste laissait beaucoup à désirer. L’auteur pose pour axiome, à l’exemple des anciens, que tous les mouvemens sont circulaires et uniformes. Dans le fait, on n’observe