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SARAH.

trie ; je regrettais la mienne, et j’ai senti ce charme. Leur curiosité me parut être de la bienveillance, car elle n’avoit rien de hardi, rien qui pût blesser le malheur même.

L’une d’elles, que le voisinage rendait plus assidue à me voir, venait chaque jour m’apprendre quelques mots de son doux langage, que j’essayais de répéter aux autres pour lui faire honneur. Si je me trompais, elles riaient toutes, mais non pas en se cachant de moi. Cette précaution, loin d’être polie, serre le cœur de celle qui devine en être l’objet. On voit avec peine une jolie bouche s’enlaidir par un sourire moqueur, se tourmenter pour le laisser entrevoir et le dérober à la fois. Cette contrainte était étrangère à mes jeunes amies ; elles éclataient d’un rire charmant ; je riais avec elles, et toutes se disputaient alors le plaisir de m’instruire.