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a fait un mémoire contre la Compagnie ; il s’est montré un mercenaire qui vend sa plume au gouvernement contre ses concitoyens. M. Necker lui a répondu avec une gravité, une hauteur et un mépris qui doivent le désoler. L’abbé se propose de répondre ; c’est-à-dire qu’après avoir donné un coup de poignard à l’homme, il veut avoir le plaisir de fouler aux pieds le cadavre. L’abbé voit mieux que nous tous : dans un an d’ici, personne ne pensera plus à l’action, et il jouira de la pension qu’on lui a promise.

Bonjour, ma bonne et tendre amie. Avancez vos deux joues que je les baise, et que je vous souhaite une bonne fête. M. Perronet[1] à côté de qui j’étais tout à l’heure à la Comédie, me chargea d’ajouter une fleur à mon bouquet. Maman, madame de Blacy, aurez-vous la bonté de donner chacune un baiser pour moi à mademoiselle ? Je vous présente à toutes mon respect. J’ai vu une seconde fois Mme Bouchard : son mari m’a paru mieux.


CXXIV


À Paris, le 2 septembre 1769.


Mais, ma bonne amie, vous n’aviez pas raison de vous plaindre : je vous avais écrit ; et dans ce moment, vous recevez une autre lettre de moi ; car je n’ai point de foi aux lettres perdues. Comment vouliez-vous que j’oubliasse que le 25 était le jour de votre fête ? Aussi assuré que je le suis de l’intérêt que vous prenez à ce qui me touche, comment pouvais-je manquer à vous instruire de mon succès ? À qui vouliez-vous donc que j’en parlasse ? Quoiqu’il n’y ait presque personne à Paris, le spectacle a toujours été plein jusqu’à la dernière représentation, et quiconque voulait y trouver place devait s’y prendre de bonne heure. Les comédiens ont été forcés de donner la pièce deux fois de plus qu’ils ne se l’étaient proposé, le parterre l’ayant re-

  1. Jean-Rodolphe Perronet, célèbre ingénieur des ponts et chaussées, né à Suresnes, en 1708, mort à Paris en 1794.