Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XVIII.djvu/276

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Continuez à me chérir comme vous faites et disposez de moi. Réponse sur l’affaire Rulhières : mais par voie et moyen sûrs.

Autre chose. Il y a ici un pauvre sculpteur, plus qu’octogénaire, et dans la plus affreuse misère. Imaginez ce que c’est que la misère à cet âge ! Il s’appelle Simon. Il suivit le czar Pierre. Il travailla et beaucoup. Le czar mourut. Le gouvernement changea. Il fut obligé de s’enfuir sans être payé. Je vous envoie son mémoire, tel qu’il me l’a remis. Voyez s’il y a lieu à quelque justice. Pour la commisération, jamais occasion ne fut plus belle. Mais il faut toute la bonté de votre âme, toute votre amitié, toute votre sensibilité pour entamer cette affaire.

Catherine seconde et le czar Pierre se touchent, mais rappeler à l’une des cours ce qui s’est passé sous l’autre, c’est jeter la ligne au fond du fleuve Léthé. Quoi qu’il en soit, me voilà quitte du spectacle hideux du pauvre Simon, qui m’a poursuivi jusqu’à présent, et des sollicitations continues de la bonne Mme Diderot, qui fait aller les choses comme son cœur et sa tête, et qui croit aussi ferme en votre bienfaisance qu’en celle de Dieu. Mon ami, lisez au moins le mémoire du pauvre Simon, et dites m’en un petit mot dans votre première réponse, afin que le malheureux voie que je ne l’ai pas oublié, et que ma femme se taise, s’il se peut.

Voilà deux lettres que je vous prie, mon ami, d’envoyer à leur adresse.


XVI


Bonjour, bons amis, bonjour. Comment vous portez-vous tous les deux ? Vous occupez-vous toujours de votre bonheur réciproque ? Avez-vous toujours la même estime, la même amitié l’un pour l’autre ? Mes amis, surtout, songez que nous sommes tous sortis du fourneau de nature avec un coup de feu, une fêlure. Cette nature est bien bizarre, elle commence son ouvrage comme si elle s’était proposé un chef-d’œuvre, puis, crac, par