Page:Dollier de Casson - Histoire du Montréal, 1640-1672, 1871.djvu/50

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la maison de toutes parts et tiraient si rudement que les balles passaient au travers de cette chétive maisonnette, qui était si peu solide, qu’après l’avoir percée, elle perça un de nos plus beaux soldats, qui est un nommé Laviolette, et le mit hors de combat, ce qui nous fut une grande perte pour cette occasion, d’autant que cet homme a toujours paru ici un des plus intrépides et vigoureux, ce qui a fait qu’on lui a donné plusieurs fois des commandements dont il s’est fort bien acquitté. Enfin, nonobstant ce malheur, il le fallut pas laisser de se battre et faire de son mieux, ce qui nous réussit très-bien et se passa de la sorte : nos meurtrières étant faites et ayant moyen de répondre aux ennemis, nous commençâmes à voir notre tour, et dans les premières décharges, nous en jetâmes une telle quantité par terre, ce qui les embarrassa fort, surtout à cause que ne voulant pas abandonner leurs morts, ils ne savaient aussi comment les enlever, d’autant que chacun qui en approchait ne manquait pas de le payer de quelques coups de fusil. Ce tintamare dura tant que nous eûmes de la poudre, mais les munitions manquèrent ; cela inquiéta fort notre major qui en témoigna quelque chose au sieur Baston qu’il savait bon coureur ; comme il avait bon courage, c’en fut assez pour le faire s’offrir d’en aller chercher. Alors monsieur Closse, tout joyeux, le mit en état de partir avec tous les témoignages d’amitié possible ; après, on lui ouvrit la porte et on favorisa sa sortie par les redoublements des décharges ordinaires en ces occasions ; enfin, malgré eux, il arriva au château d’où il revint bien amunitionné, avec 8 ou 10 hommes, qui étaient tout ce qu’on pouvait lui fournir, conduisant à couvert deux petites pièces de campagne chargées à cartouche, à la faveur d’un rideau lui passe depuis le château jusqu’à vis-à vis la maison attaquée. Quand il fut le plus proche qu’il pouvait aller à couvert, tout à coup il parut sur le rideau avec ses deux canons, qu’il tira sur les Iroquois. M. Closse, qui l’entendait, sortit tout aussitôt avec son monde pour favoriser son entrée, dont le régal fut un redoublement de coups de fusil afin de faire connaître aux Iroquois si cette poudre valait bien la précédente, mais comme ils virent qu’on était moins chiche qu’avant l’arrivée de Baston, ils jugèrent qu’il valait mieux se retirer, que d’user plus amplement de nos libéralités ; il est vrai que comme ils étaient au pied de la maison, cette retraite était un peu difficile, aussi en s’enfuyant reçurent-ils bien des coups. On ne sait pas au vrai le nombre de leurs morts, quoiqu’ils aient beaucoup perdu eu cette occasion, parce qu’ils les emportèrent quasi tous, et qu’ils n’ont pas accoutumé de se vanter des gens qu’ils ont ainsi perdus. Il est vrai qu’ils n’ont pas pu s’en faire absolument et que exagérant les pertes des leurs, ils les ont