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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

Mais, grâce à ces eaux, je participe aux bonheurs d’une élite ! Après cela, avec quelle joie nous irons boire notre affreux café allemand ! Voilà ce que j’appelle les avantages positifs de la bonne société.

— Vous riez. Mais ce n’est pas neuf, tout cela.

— Je ris. Mais dites-moi si votre appétit s’améliore depuis que vous prenez les eaux.

— Naturellement, et d’une façon extraordinaire.

— Ainsi les avantages positifs du bon ton sont tellement forts qu’ils agissent même sur votre estomac.

— Mais ce n’est que l’influence des eaux et non pas celle du bon ton.

— Et celle du bon ton, Monsieur, incontestablement. On ne sait pas au juste ce qui fait le plus d’effet, les eaux ou le bon ton. Les docteurs eux-mêmes hésitent à quoi donner la palme. La médecine a fait un pas immense, ces temps-ci : aujourd’hui elle donne jusqu’à des idées ; autrefois elle ne nous offrait que des drogues.

VII


L’HOMME COMBLÉ DE BIENFAITS PAR LA FEMME MODERNE


Naturellement, je ne vais pas reproduire toutes mes conversations avec cet homme paradoxal. Mais nous eûmes un jour un entretien sur les femmes, que je veux rapporter. Il me fit observer que je regardais les femmes de trop près.

— Ce sont les Anglaises que je regarde de si près, et avec intention. Figurez-vous que j’ai emporté de Russie deux brochures pour la route : l’une ; c’est la Question d’Orient, par Granowsky, l’autre traite des femmes. Dans ce dernier opuscule, j’ai trouvé de fort belles pensées. Une phrase, pourtant, m’a plongé dans l’étonnement. L’auteur écrit sans dire gare :