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L’ASTRONOMIE PYTHAGORICIENNE


autour du milieu et du centre de la Terre (πῦρ εἶναι δημιουργιϰὸν περὶ τὸ μέσον τε ϰαὶ ϰέντρον τῆς γῆς) ; c’est lui qui réchauffe la Terre et l’anime, c’est lui qui maintient l’ordre à sa surface. Ils disent que la Terre est un astre en tant qu’elle est un instrument [du temps]. Pour eux, l’Anti-terre est identique à la Lune. Ils la nomment une terre éthérée ; l’Univers ayant été divisé en douze parties, ils prennent les trois éléments pour la composer. Cet astre qui est en mouvement (Τοῦτο δὲ τὸ ἄστρον φερόμενον) » — c’est à la Terre que revient notre scholiaste, après avoir parlé de la Lune — « Cet astre qui est en mouvement fait la nuit et le jour ; la nuit, en effet, provient du cône d’ombre qu’il projette derrière lui ; le jour est en la région de la Terre qui est éclairée par le Soleil. Pour ces raisons, ils ont nommé le feu tour et poste de garde de Jupiter ; ils l’appellent aussi demeure de Vesta (Ἡστίας οἶϰος) et trône de Jupiter ; le centre, en effet, est le siège des puissances conservatrices de ces dieux et la cause de l’union entre les parties de l’Univers ».

Parmi ces Pythagoriciens, mieux informés que les sectateurs de Philolaüs, dont Simplicius et le scholiaste anonyme viennent de nous faire connaître les doctrines, il nous faut, sans aucun doute ranger Hicétas et Ecphantus ; ils étaient de ceux, en effet, qui ne mettaient pas la Terre hors du centre du Monde, pour la faire tourner autour d’un feu allumé en ce centre ; ils la faisaient tourner sur elle-même, mais il est vraisemblable qu’en la masse de ce corps, ils enfermaient le feu central.

Les divers textes cités en ce Chapitre représentent à peu près tout ce qui nous est parvenu de renseignement astronomique donné par les Écoles de la Grande Grèce ; ce sont documents bien fragmentaires, au moyen desquels il est fort malaisé de reconstituer les diverses doctrines professées par les Pythagoriciens au sujet des mouvements célestes, et de deviner comment ces doctrines oui pu dériver les unes des autres. Le peu que nous savons, toutefois, des systèmes élaborés par les Pythagoriciens pour rendre compte des mouvements célestes suffit à éveiller en nous l’étonnement et l’admiration ; on demeure surpris de la fécondité et de l’ingéniosité de la pensée hellénique ; à peine cette pensée se trouve-t-elle aux prises avec le problème astronomique, qu’elle en multiplie les essais de solution et qu’elle l’aborde par les voies les plus diverses. Tandis que nous continuerons à parcourir l’histoire de l’Astronomie grecque, ces sentiments d’étonnement et d’admiration ne cesseront de grandir.