Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/153

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Et après cela, il appelle les « Dieux promis, les formes idéales » : les Dieux promis, les Dieux rêvés, ne peuvent être conçus que sur le modèle des Dieux grecs. Ce sentiment ne sera pas celui d’une heure ; il persistera. Dans la Paix, l’homme redemande ses Dieux, les Dieux en général : « dorment-ils à jamais ? » dit-il ; et aussitôt après, sans transition, et comme la suite naturelle de la pensée, c’est la strophe suivante :


Où sont les Bienheureux, Princes de l’Harmonie,
Chers à la sainte Hellas, toujours riants et beaux,
Dont les yeux nous versaient la lumière bénie
Qui semble errer encor sur leurs sacrés tombeaux ?


Cependant, quoiqu’il soit la religion du peuple exceptionnel, privilégié, de la « race choisie », comme il est dit dans cette même Paix des Dieux, le polythéisme grec n’est pas un phénomène unique ; il n’est qu’une lumière plus vive au milieu de la multitude des religions païennes. Les Olympiens viennent du berceau commun de toutes les divinités des anciennes races, du « très saint Orient qui conçut tous les Dieux »[1]. Le regard de Leconte de Lisle embrasse ici un horizon plus large que celui de Ménard ;

  1. L’Orient [Derniers poèmes].