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traction mutuelle des parties qui s’attirent moins ou plus, ſelon la grandeur des contacts, de leurs molécules, la figure des parties intégrantes entrant comme élément dans la diſtance. Voyez Mollesse, Dureté, Élasticité, Fluidité.

La réunion en une ſeule goutte de deux gouttes d’eau & d’autres liquides qui ſe touchent, ou ſont près de ſe toucher, eſt encore un phénomène qui prouve l’attraction dans les petites diſtances. Sans l’attraction mutuelle de ces deux gouttes, miſes à une diſtance qui ne ſoit pas hors de la ſphère de leur activité réciproque, il n’y auroit aucune réunion. En vain a-t-on tenté pour expliquer ce phénomène d’avoir recours à la matière ſubtile qui pénétrant, dit-on, plus facilement les pores de l’eau que ceux de l’air, forceroit l’air intermédiaire de ſe porter vers les côtés, & donneroit ainsi à l’air qui eſt derrière chaque goutte, l’occaſion de les pouſſer l’une contre l’autre. Car cette matière ſubtile, telle que la conçoivent les Cartéſiens, eſt un être imaginaire ; d’ailleurs, il n’eſt pas prouvé que les pores de l’eau ſoient plus grands que ceux de l’air, ou que l’eau ſoit plus perméable que l’air à cette matière ſubtile. Mais quand on admettroit ces deux ſuppoſitions, on n’en ſeroit pas plus avancé ; il en reſulteroit au contraire que la matière ſubtile penchant plus facilement l’eau que l’air, en ſortant de chaque goutte d’eau, ſeroit accumulée entre les deux gouttes, frapperoit l’air intermédiaire qui ſe rétabliſſant après la compreſſion, repouſſeroit & éloigneroit les gouttes d’eau, bien loin de les rapprocher, ce qui eſt démenti par l’expérience. D’un autre côté, la matière ſubtile qui remplit les angles que forment les gouttes avant leur réunion, celle qui pèſe ſur ces gouttes, lorſqu’elles ont commencé à ſe toucher, ayant même baſe & même hauteur que le fluide latéral, agit autant pour  les écarter que celui-ci pour les rapprocher, & par conſéquent le mouvement d’approximation ne peut venir du fluide ou matière ſubtile ſuppoſée, mais d’une force attractive qui agit réciproquement ſur chaque goutte.

Des gouttes placées ſur un plan verniſſé, ou ſur une feuille de chou, paroiſſent parfaitement ronde à la vue ſimple ; elles ſont aplaties ſi on les poſe ſur un plan plus denſe & plus attirant. Or, quel eſt le fluide qui arrondit ces gouttes, dit Sigorgne, qui ſoutient par le bas, non ſeulement l’effort du fluide ſupérieur qui tend à les applatir & à les écarter, mais encore l’effort de leur propre peſanteur ?

Ce phénomène de la réunion de deux gouttes en une ſeule, n’eſt pas propre à l’eau, à l’eſprit-de-vin, à l’huile & à tous les fluides analogues, mais ſe fait auſſi remarquer, d’une manière très-ſenſible dans le mercure. Si deux globules de mercure ſont placés à une très-petite diſtance l’un de l’autre ſur un plan poli, on les verra ſe rapprocher ſucceſſivement avec un mouvement qui paroît augmenter à proportion que la diſtance diminue.

Si on met de l’eau dans un verre, de manière à ne pas le remplir, on verra ce liquide s’élever plus haut vers les bords que dans le milieu ; c’eſt un fait conſtant & qui réuſſit toujours, quelque forme qu’ait le vase de verre. Cet effet depend uniquement de l’attraction que les bords du verre exercent ſur l’eau, qui eſt au point de contact ou qui en eſt proche ; c’eſt pour cette raiſon que l’élévation de l’eau n’eſt viſible que près des bords, parce que l’attraction dont nous parlons ne s’étend qu’à de très-petites diſtances. Cette expérience a toujours le même ſuccès, avec quelque liqueur qu’on le répète, à moins qu’on n’y emploie le mercure. Dans ce cas, on voit conſtamment ce liquide s’élever vers le milieu, & s’abaiſſer vers les bords & préſenter une ſurface convexe. Ce nouveau phénomène eſt encore une ſuite de l’attraction de cohéſion ; car les parties du mercure s’attirent plus entr’elles qu’elles ne ſont attirées par le verre ; au contraire, les parties de l’eau étant plus attirées par le verre qu’elles ne s’attirent mutuellement, la ſurface de l’eau ſera concave.

Si on approche un morceau de criſtal d’une très-petite goutte de mercure placée ſur un papier, on pourra, en levant enſuite le criſtal, enlever la gouttelette de mercure ; ſi après on préſente cette gouttelette à une autre très-petite goutte de mercure, celle-ci s’élancera vers la première & formera une goutte plus groſſe qu’on enlèvera encore avec le cristal. Au contraire, approchez cette goutte d’une goutte plus groſſe que le criſtal ne puiſſe enlever, celle-ci entraînera à elle le mercure ſuſpendu au cristal. Variez l’expérience, l’auteur des inſtitutions Newtoniennes, rempliſſez de mercure par voie de succion un tuyau fort étroit, poſez-le horiſontalement ; il en reſtera une petite portion dans ce tuyau ; élèvez-le, cette partie ne tombera pas ; approchez obliquement ce tuyau du vif argent, qui eſt en maſſe dans la cuvette, & tout ce qui eſt dans le tuyau s’écoulera : cependant le fluide ambiant preſſe le mercure de la cuvette pour le pouſſer dans le tuyau, & pour y retenir la petite portion qui y eſt. Pourquoi donc s’écouleroit-elle à ce moment, puiſqu’auparavant elle étoit ſuſpendue ? « Secouez un peu rudement un baromètre, & vous verrez la colonne qui deſcend, former à ſa partie ſupérieure une ſurface concave contre le verre, tandis qu’à l’ordinaire elle eſt convexe. Or, d’où vient cette ſurface concave, ſinon d’une adhérence au verre, & qui ne peut tout à coup être vaincue ; & cette adhérence, qui l’a produite dans le baromètre ? Inclinez l’une à l’autre deux glaces de miroir ſous un angle fort aigu, & que leur point de concours ou de réunion ſoit tournée vers le bas ; gliſſez-y ou laiſſez-y tomber une petite goutte de mercure, elle ſe précipitera dans l’angÌë & s’y applatira ; bientôt après elle remontera, fuira cet angle, & ſe tiendra à une cer-