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II


L’hiver se passa doucement à Guersac. Lorsque le temps était trop mauvais, la petite demoiselle n’allait pas au Prieuré, ce qui la contrariait fort. Non pas qu’elle eût grande envie d’apprendre, mais elle aimait ces allées et venues qui rompaient la monotonie de sa vie d’enfant et pendant lesquelles Damase était à son commandement exclusif. Elle se plaisait à être maîtresse toujours. Et puis, M. de La Ralphie était un bon père assurément, mais, dans l’état où il se trouvait, des préoccupations étrangères perçaient parfois dans les manifestations de son amour paternel, et Valérie le sentait. Son esprit, habitué jadis aux affaires sérieuses, était assez inhabile, aussi, à se prêter aux caprices enfantins de sa fille : il le faisait, mais un peu gauchement. Il ne savait pas, en cédant, les guider, les contenir doucement ; il ne savait pas, surtout, la distraire des troubles qui agitent les enfants précoces. Une mère, seule, du reste, eût pu apaiser, dans quelque mesure, les curiosités inquiètes de cette petite qui cherchait le pourquoi de tout et bercer son ignorance qui s’irritait de ces contes puérils avec lesquels on arrête les enfants sans les persuader. M. de La Ralphie avait si peu l’intuition de ces choses, qu’il ne songeait pas aux inconvénients qu’il pouvait y avoir à confier sa fille à un garçon de seize ans, qui, à peu près tous les jours, la conduisait, montée sur sa bête, par les chemins du Prieuré. Toute sa sollicitude se bornait à la préserver des dan-