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feu, un beau feu. Le feu ne procure pas seulement de la chaleur, il procure aussi de la gaîté. Dans certaines régions, les fêtes populaires sont toujours agrémentées par un feu de joie autour duquel chante et danse la population. Les feux d’artifices, par leurs effets agréables et pittoresques, sont également une source de réjouissance. Hélas ! le feu n’est pas toujours à la portée du pauvre, et il existe des malheureux qui, faute de ressources, n’ont pas de feu, l’hiver, pour alimenter leur foyer. Être sans domicile, sans logis, être sans feu ni lieu :

Mais moi, grâce au destin, qui n’ai ni feu ni lieu,
Je me loge où je puis et comme il plaît à Dieu.

Boileau.

Incendie, embrasement. Il y a le feu ; le feu est à tel endroit ; les pompiers ont lutté durant deux heures contre ce feu. Faire feu, c’est-à-dire tirer, se servir d’une arme à feu, d’un revolver, d’un fusil, d’un canon. S’emploie aussi comme synonyme de chaleur : les feux de l’été.

Locutions proverbiales : Mettre sa main au feu, c’est-à-dire affirmer être certain. Il n’y a pas de fumée sans feu.

Violence, ardeur, dans les sentiments et les passions. « Sondez bien votre cœur, et voyez s’il est possible d’éteindre le feu dont il est consumé » (J.-J. Rousseau). Le supplice du feu. Supplice qui consistait à brûler les individus qui étaient accusés de crimes contre la religion. On brûlait en même temps les livres ou les écrits qui gênaient les autorités ecclésiastiques.

La religion catholique, non contente d’avoir supplicié par le feu des milliers d’êtres humains, promet aux infidèles les tourments de l’enfer et les condamne au feu du purgatoire.

Au figuré : générosité, courage, ardeur ; entretenir le feu sacré de la liberté. Manquer de feu. Feu !… Ordre par lequel on oblige les militaires à tirer sur… En joue ! Feu ! Le feu de la guerre. A côté de tous les bienfaits qui peuvent en résulter, le feu a dans son histoire des pages noires. Ce sont celles de la guerre, des guerres, qui depuis des siècles et des siècles ravagent l’humanité. Faut-il donc, quelle que soit la répugnance que l’on puisse avoir pour la violence, user des mêmes moyens que nos oppresseurs, et les obliger par le feu et par le sang à desserrer l’étau de fer dans lequel ils étreignent le peuple ? C’est parce que la bourgeoisie et le capital le veulent, que le monde est une vallée de larmes, et ce sont eux qui seront responsables des incendies qui s’allumeront demain. Car du peuple jaillira le feu qui éclairera l’aube de la liberté…

FEU (Le). — Roman vécu, dû à la plume d’Henri Barbusse, le célèbre écrivain français, qui sut traduire en termes simples et émouvants les affres et les souffrances du soldat durant la guerre de 1914. C’est une œuvre sociale d’une valeur littéraire incontestable et d’une haute portée morale.


FIASCO n. m. (d’origine italienne). Échouer complètement dans une entreprise. Faire fiasco : c’est un fiasco, un véritable fiasco. La guerre de 1914 fut pour les peuples « vainqueurs » comme pour les peuples « vaincus », un fiasco retentissant. Les mouvements ouvriers aboutissent bien souvent à un fiasco ; cela tient à la division qui règne en maîtresse dans les rangs prolétariens et à la mauvaise organisation des travailleurs. La politique qui se glisse dans toutes les associations de prolétaires est un facteur de fiasco, et neuf fois sur dix, lorsque les travailleurs échouent dans leurs luttes, c’est qu’ils se laissent conduire par de mauvais bergers, pour qui la classe ouvrière n’est

qu’un moyen propre à satisfaire toutes leurs ambitions.

Toutes les tentatives d’affranchissement aboutiront à des fiascos, tant que la classe laborieuse ne s’inspirera pas de cette vérité contrôlée par l’expérience : que de sa force seule dépend son avenir, et que sa libération est subordonnée à sa volonté de se détacher de l’emprise patronale. Toutes les victoires politiques sont des fiascos, malgré les apparences. Seules les conquêtes économiques comptent dans la vie des travailleurs. Nous en avons un exemple frappant si l’on considère l’organisation actuelle de la Russie, où la victoire politique de la classe ouvrière n’en est pas moins un fiasco au point de vue économique.


FIDÉLITÉ (du latin fidelis, de fides, foi). La fidélité est la constance dans les affections. C’est aussi l’exactitude à remplir ses engagements. Dans ces deux cas tout au moins, il s’agit bien d’une qualité précieuse, et non d’un préjugé. Une amitié fidèle est une amitié que ni le temps, ni l’adversité, ne peuvent affaiblir. Il n’est pas de plus grand réconfort au cours d’une existence tourmentée. Un amour fidèle est un amour qui domine toutes les circonstances de la vie et, malgré les ans et les déceptions, demeure attaché à son objet. Qui donc ne souhaiterait d’être aimé ainsi ? La fidélité a un idéal, c’est la lutte persévérante à son service, malgré les obstacles qui s’opposent à sa réalisation. Lui préférerait-on le caprice des snobs ou le mercantilisme des « girouettes » ? Quant au respect de la parole donnée, il est la condition indispensable de l’harmonie dans une société libre. Le loisir peut, en effet, demeurer sans grand inconvénient à la merci de la fantaisie, non la production industrialisée. La lutte collective, par vastes associations, pour la conquête quotidienne du maximum de bien-être, avec le minimum d’efforts, comporterait — sous peine de misère générale à bref délai — l’observation stricte de dures règles de présence et de travail, imposées non par l’arbitraire, mais par l’inéluctable nécessité. Qu’un trop grand nombre de travailleurs ne se fassent pas de l’observation de ces règles un cas de conscience, et ce serait, inévitablement, d’abord le gaspillage et la gêne, les tâches rendues plus longues ; ensuite, la révolte légitime des bonnes volontés contre l’insouciance et le parasitisme ; finalement, le recours à des moyens de force — c’est-à-dire à l’autorité — pour la préservation de la sécurité publique, les citoyens trouvant, une fois de plus, meilleur bénéfice à se replacer sous le joug de lois sévères, qu’à continuer de subir dans une liberté toute théorique, les licences de leurs voisins.

Le mot fidélité est employé fréquemment pour désigner la qualité de ce qui est de bonne foi, ou conforme à la vérité. On dit, par exemple, d’une personne qu’elle est un témoin fidèle, lorsqu’elle décrit, sans en altérer le caractère et la portée, avec le souci dominant de la réalité des faits, les événements auxquels il lui a été donné d’assister. Voici une vertu d’autant plus digne d’estime qu’elle est plus rare. C’est, en effet, un travers commun à beaucoup trop de gens que de décrire les choses — non telles qu’elles sont — mais telles qu’ils voudraient qu’elles fussent pour le mieux de leurs convenances personnelles. Ceci n’aboutit qu’à faire perdre du temps au monde, car l’illusion masque la réalité, mais ne la modifie point, et, tôt ou tard, la vérité se révèle à tous les yeux, tel le soleil dissipant les brumes.

Dans le code du mariage, le mot fidélité se rapporte à l’obligation légale faite aux conjoints, mais tout particulièrement à la femme, de n’avoir de rapports sexuels qu’entre eux, à l’exclusion de toutes autres personnes. Et voici, en raison des circonstances qui président aux épousailles, un cas où la fidélité mérite