Page:Fiel - Armelle devant son vainqueur, paru dans l'Ouest-Éclair du 3 septembre au 10 octobre 1937.djvu/10

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pour se situer. Il fallait bien montrer à ce peintre trop studieux de quel monde elles étaient et que c’était un honneur pour lui de brosser une toile en compagnie de jeunes filles d’un rang enviable.

Que pensa le jeune homme de cet étalage ? Nul ne le sut.

Il rangea, posément, vers seize heures, ses brosses et sa toile, épousseta d’une chiquenaude une poussière logée sur sa manche, se regarda pour s’assurer de la correction de sa mise, eut une inclinaison de tête vers les jeunes artistes et s’en alla de son pas élégant.

— Quel sphinx ! s’écria Louise.

— S’il ne parle pas davantage demain et après, nous en serons pour nos frais de peinture !

— Il est vraiment bien, et il peint dans la perfection, dit Cécile J’étais honteuse de mon esquisse…

— Ce n’était pas la peine, parce qu’il n’a pas plus regardé nos toiles que nos figures, prononça, dépitée Roberte Célert.

— Nous n’avons plus qu’à quitter la place aussi, reprit Louise, en repliant son chevalet. Ce n’est pas encourageant pour nous mais je veux croire que ce monsieur finira par s’apercevoir de notre présence. Ce n’est pas flatteur vraiment, pour des jeunes filles de notre valeur sociale, de n’avoir pas suscité plus d’attention de la part d’un jeune homme.

Roberte Célert, qui était peut-être la moins entreprenante, se trouvait assez ennuyée de s’être embarquée dans cette aventure. Mais c’eût été peu charitable de laisser ses compagnes en plan, et elle ne dévoila pas sa pensée à ce sujet.

Elle craignait que ce peintre si cor-