Page:Fiel - Le Sacrifice et l'Amour, paru dans l'Écho de Paris du 3 février au 7 mars 1934.djvu/218

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nouillé, le front contre la couverture, et il resta-sans bouger quand Christiane entra.

— Mon amie, prononça Bertranne de cette voix qu’ont ceux qui sont profondément atteints, je vais mourir…

— Oh ! tais-toi, Bertranne !

— Cet après-midi, je me suis stupidement piquée en disséquant un cadavre… Il n’y a rien à tenter… la mort rôde autour de moi.

— Mon Dieu !… murmura la jeune fille, quelle affreuse chose !

Elle tremblait de tous ses membres.

— Ne parle pas, reprit Bertranne, j’ai encore beaucoup de choses à te dire… avant…

— Non, tu ne mourras pas ! s’écria Christiane avec force… Tu es trop jeune… la médecine a des ressources !

— Des millions d’hommes, encore plus jeunes que moi, sont morts pour leur patrie, et cette idée donne du courage. Mais, ce n’est pas de cela que je veux t’entretenir, parce[illisible] que, toi aussi, tu as eu une énergie surhumaine. L’approche de la mort rend clairvoyant. Je réfléchis depuis quatre heures que je suis couchée, et une clarté m’a été révélée tout à coup… Je n’avais encore eu que des doutes… Promets-moi que tu ne me cacheras pas la vérité : c’est à toi que j’ai dû mon bonheur, n’est-ce pas ? Tu aimais Robert, et il t’aimait ?