Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

un train express n’importe où. Il regretta de ne pas savoir la médecine pour prendre quelque chose qui, sans exposer ses jours, ferait croire à sa mort. Il arriva jusqu’à désirer être malade, gravement.

Afin d’avoir un conseil, un secours, il envoya chercher M. des Aulnays. L’excellent homme était retourné en Saintonge, sur une dépêche lui apprenant l’indisposition d’une de ses filles. Cela parut de mauvais augure à Cisy. Heureusement que M. Vezou, son précepteur, vint le voir. Alors il s’épancha.

— Comment faire, mon Dieu ! comment faire ?

— Moi, à votre place, monsieur le Comte, je payerais un fort de la halle pour lui flanquer une raclée.

— Il saurait toujours de qui ça vient ! reprit Cisy.

Et, de temps à autre, il poussait un gémissement ; puis :

— Mais est-ce qu’on a le droit de se battre en duel ?

— C’est un reste de barbarie ! Que voulez-vous !

Par complaisance, le pédagogue s’invita lui-même à dîner. Son élève ne mangea rien, et, après le repas, sentit le besoin de faire un tour.

Il dit en passant devant une église :

— Si nous entrions un peu… pour voir ?

M. Vezou ne demanda pas mieux, et même lui présenta de l’eau bénite.

C’était le mois de Marie, des fleurs couvraient l’autel, des voix chantaient, l’orgue résonnait. Mais il lui fut impossible de prier, les pompes de la