Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/170

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prouver sa puissance, tout ce qu’on peut imaginer de suave, de délicat, de parfait et d’achevé ?

N’est-ce pas assez pour un roman, et devons-nous favoriser à ce point le libertinage de notre héros, que de lui accorder deux maîtresses à la fois ? Il voudrait mieux donner six amants à Musidora que deux maîtresses à Fortunio. Les femmes nous le pardonneraient plus facilement, Dieu sait pourquoi.

Nous ferons tous nos efforts pour contenter la curiosité de nos lectrices.

Soudja-Sari n’est pas une ancienne maîtresse de Fortunio, puisqu’il vient de dire qu’il l’ira voir demain. Où l’ira-t-il voir ?… Je ne pense pas que ce soit à Java ; et, quand même Fortunio possèderait le bâton d’Abaris, il ne pourrait faire ce voyage du soir ou lendemain, et il a promis à Musidora de se montrer avec elle, en grande loge, à l’Opéra, à la prochaine représentation. ― Ainsi Soudja-Sari est donc à Paris ou dans la banlieue.

Mais dans quel endroit ? Est-ce cité Bergère, où logent les houris, ou dans le faubourg Saint-Germain ? à Saint-Maur ou à Auteuil ? Hic jacet lepus ; c’est là que gît le lièvre.

Nous nous bornerons à dire que Soudja-Sari signifie : œil plein de langueur, suivant l’usage oriental, qui donne aux femmes des noms tirés de leurs qualités physiques.