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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

rieurs, mais encore la béatitude parfaite. Car, demandez les grandes choses, dit le Seigneur, et les petites vous seront données par surcroît. La seconde manière de régner, après la manière pure et divine, dont nous venons de parler, est celle qui n’a pour principe et pour mobile que la partie impétueuse et irascible de l’âme. Telle fut la méthode d’Hercule, roi d’Argos, et celle d’Alexandre, roi de Macédoine. La troisième est celle qui a pour principe unique le désir de vaincre et de détruire. Dans ce cas, qu’importe le bon ou le mauvais usage de la victoire ? telle fut la conduite des rois de Perse, dans la guerre qu’ils entreprirent contre la Grèce. Les mouvements impétueux de l’âme sont de deux sortes : Les uns désirent l’emporter à tout prix, et ne veulent régner que par amour pour la domination ; les autres ont le goût des choses honnêtes, et leur fougue est un instrument dont l’âme se sert pour atteindre à des résultats louables. La quatrième manière de régner est la pire de toutes ; elle ne reconnaît pour règle et pour guide que la passion. Telle fut celle de Sardanapale, telle est celle de ceux qui se proposent pour unique fin de satisfaire leurs désirs le plus qu’ils pourront. L’art de régner, tant celui qui triomphe par la vertu que celui qui triomphe par la force, a pour instrument la tactique, art qui varie selon la diversité de son objet. L’âme et l’intelligence, avec le secours d’instruments animés ou inanimés, disposent les armes et les animaux propres à la guerre. Mais les mouvements de l’âme, les agitations intérieures dont la vertu nous rend maîtres, c’est la raison qui les discipline, en donnant à la continence et à la tempérance la sainteté et la connaissance de la vérité pour règle, et en rapportant tout à la piété et à la religion. De la sorte, en effet, chez ceux qui pratiquent la vertu, c’est la prudence qui règle tout ; à l’égard des choses divines, c’est la sagesse ; à l’égard des choses humaines, c’est la politique ; et à l’égard des choses divines réunies aux choses humaines, c’est l’art de régner. Il est donc roi, celui qui gouverne selon les lois, et qui possède la science de commander à des volontés libres. Tel est le Seigneur, lui qui admet dans son royaume