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nage[1]. Les Romains, toujours tourmentés par un faible souvenir de leurs ancêtres, voyaient avec une pieuse indignation cette suite de Saxons, de Français, de princes de Souabe et de Bohême, usurper la pourpre et les prérogatives des Césars.

Le royaume d’Italie. A. D. 774-1250.

Il n’y a peut-être rien de plus contraire à la nature et à la raison que de tenir sous le joug, contre leur gré et contre leur intérêt, des pays éloignés et des nations étrangères. Un torrent de Barbares peut passer sur la terre ; mais pour maintenir un empire étendu, il faut un système approfondi de politique et d’oppression. Il doit y avoir au centre un pouvoir absolu prompt à l’action et riche en ressources ; il faut pouvoir communiquer facilement et rapidement d’une extrémité à l’autre ; il faut avoir des fortifications pour réprimer les premiers mouvemens des rebelles ; une administration régulière capable de protéger et de punir, et une armée bien disciplinée qui puisse inspirer la crainte sans exciter le mécontentement et le désespoir. Les Césars de l’Allemagne, dans leur projet d’asservir le royaume d’Italie, se trouvaient dans une position bien différente. Leurs domaines patrimoniaux s’étendaient le long du Rhin ou étaient dispersés dans leurs diverses provinces ; mais l’imprudence ou la détresse de plusieurs princes

  1. À l’occasion d’une querelle qui survint au couronnement de Conrad II, Muratori prend la liberté d’observer que : Doveano ben essere allora indisciplinati Barbari, e bestiali i Tedeschi. (Annal., t. VIII, p. 368.)