Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/238

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des Grecs, en fit un bataillon serré, et se précipita avec vigueur contre les Turcs, qui ne résistèrent à la force du choc que par l’adroite souplesse de leurs mouvemens. La plus grande partie d’un jour d’été fut employée à cet inutile combat ; la prudence et la fatigue le déterminèrent à rentrer dans son camp. Mais une retraite en présence d’un ennemi actif est toujours dangereuse ; et du moment où l’on porta les drapeaux sur les derrières, la phalange se rompit par la lâcheté ou la jalousie plus vile encore d’Andronicus, prince rival de Romanus, qui déshonorait sa naissance et la pourpre des Césars[1]. Dans ce moment de confusion et de fatigues, les Grecs furent accablés d’une nuée de traits lancés par les escadrons turcs, qui, des pointes de leur redoutable croissant, enfermèrent les derrières de l’ennemi. L’armée de Romanus fut taillée en pièces, son camp fut pillé, et il est inutile d’indiquer le nombre des morts et celui des captifs. Les écrivains de Byzance regrettent une perte d’un prix inestimable, et ils oublient de nous dire que cette fatale journée enleva pour jamais à l’empire ses provinces d’Asie.

Captivité et délivrance de l’empereur.

Aussi long-temps qu’il demeura quelque espérance,

  1. Il était fils de César-Jean Ducas, frère de l’empereur Constantin (Ducange, Fam. byzant., p. 165). Nicéphore Bryennius loue ses vertus et atténue ses fautes (l. I, p. 30-38 ; l. II, p. 53) ; mais il avoue sa haine pour Romanus, ο‌υ πανυ δε φιλιως ξχον προς βασιλεα. Scylitzes parle plus nettement de la trahison d’Andronicus.