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Funérailles de Julien.

D’après un ancien usage, dans les cérémonies des funérailles et du triomphe des Romains, la voix de la satire et du ridicule venait modifier celle de la louange. Au milieu de ces pompes éclatantes qui étalaient la gloire des vivans ou celle des morts, on dévoilait leurs imperfections à l’univers[1]. C’est ce qu’on vit à l’enterrement de Julien. Les comédiens se souvenant de son aversion et de son mépris pour le théâtre, représentèrent et exagérèrent, avec l’applaudissement des chrétiens, les fautes et les bizarreries du défunt empereur. Les inconséquences de son caractère et la singularité de ses manières ouvrirent un vaste champ à la plaisanterie et au ridicule[2]. Dans l’exercice de ses talens extraordinaires, il avait souvent dégradé la majesté de la pourpre. Alexandre s’était transformé en Diogène, et le philosophe s’était abaissé aux emplois d’un prêtre. Son excessive vanité avait nui à la pureté de ses vertus ; ses superstitions

    Huns au criminel oubli qui a laissé la mort de Julien sans vengeance.

  1. Aux funérailles de Vespasien, le comédien qui jouait le rôle de cet empereur économe, demanda avec inquiétude combien coûterait sa sépulture ; et lorsqu’on lui eut répondu quatre-vingt mille livres (centies) : « Donnez-moi, dit-il, la dixième partie de cette somme, et jetez mon corps dans le Tibre. » Suéton., in Vesp., c. 19, avec les notes de Casaubon et de Gronovius.
  2. Saint Grégoire (orat. 4, p. 119, 120) compare cette ignominie et ce ridicule prétendus, aux honneurs que reçut Constance au moment de ses funérailles, où un chœur d’anges chanta ses louanges sur le mont Taurus.