Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/470

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suffira pour que le prix de la main d’œuvre s’élève progressivement, par suite de l’accroissement général des richesses qui est la condition normale des sociétés prospères.

Ce raisonnement est loin d’être irréfutable.

D’abord en admettant même que la main-d’œuvre ne soit qu’une marchandise passivement soumise aux lois de l’offre et de la demande, il n’en résulte pas qu’on ne pût agir sur le prix de la main-d’œuvre en agissant sur les causes qui font varier l’offre et la demande. On a bien la prétention, justifiée dans une certaine mesure, de pouvoir agir efficacement sur le prix des marchandises par des syndicats de producteurs (Cartels) ou par des systèmes protectionnistes. Pourquoi n’aurait-on pas la même prétention en ce qui concerne le prix de la main-d’œuvre ? Et telle est justement la prétention des associations ouvrières (Trades-Unions) d’arriver à relever le taux des salaires en raréfiant l’offre de la main-d’œuvre par le raccourcissement de la journée de travail, la limitation du nombre des apprentis, l’expulsion des ouvriers étrangers, l’interdiction du travail à prix fait et même parfois des procédés mécaniques.

Il est vrai que l’on déclare que ces mesures sont absolument vaines et que, même dans le cas où elles relèveraient les salaires pour certaines catégories d’ouvriers, elles n’atteindraient ce but qu’au détriment de la classe ouvrière en général. Et nous inclinons en effet à le croire.

Mais la vraie réponse à faire, c’est que la main-d’œuvre ne peut être assimilée à une marchandise. Nous ne nions pas qu’en fait le travailleur humain ne subisse la loi du marché et n’y soit soumis aux mêmes variations de cotes que le cours des cotons ou des charbons. Nous disons seulement que cela, loin d’être naturel, est contre nature. Il y a une réaction de plus en plus marquée contre cet état de choses — réaction dans laquelle les ouvriers, soutenus par l’opinion publique et par la loi, demandent à être traités non comme des choses,

    de placement, justement odieux aux ouvriers, servent surtout de centres de propagande pour les ouvriers syndiqués.