Page:Gracian - Le Héros, trad de Courbeville, 1725.djvu/11

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politique, les grands hommes dans la magistrature, les génies extraordinaires pour les lettres, etc. En effet, on peut bien dire que tous les grands hommes se ressemblent en un sens, et c’est que la nature les a comme marqués à un même coin. Quelque différents que puissent être les talents qui les distinguent, la supériorité de leur mérite met entre eux un rapport commun. C’est la pensée de M. l’Abbé Massieu.

Au reste, si l’on veut encore chicaner Gracian sur le peu de liaison que l’on croit découvrir entre le titre de ses ouvrages et les matières qu’il traite, et chicaner aussi son traducteur sur quelques expressions trop hardies, je n’ai point d’autre réponse à faire que celle de Mademoiselle de Gournay dans sa Préface des Essais de Montaigne qui l’appelait sa fille, et que Juste-Lypse appelait sa sœur.

« Pour le regard de quelques-uns qui veulent étendre les effets de cette prétendue ignorance de l’esprit jusqu’aux changements de quelques termes usités en l’art vulgairement, libertinage de sa méthode, suite décousue de ses discours et manque même de relation de ses chapitres avec leurs titres parfois, s’ils sont capables de croire qu’une tête de ce calibre ait manqué par capacité à faire en cela, ce que tout écolier de quinze ans peut et fait, je trouve qu’ils sont si plaisants à parler, que ce serait dommage de les faire taire. Ces messieurs avec leurs belles animadversions ont volontiers cueilli l’une des branches de l’ignorance doctorale, laquelle mon père nous avertit en quelque lieu, que la science fait, et défait la populaire. La vraie touche des esprits, c’est l’examen d’un nouveau livre, et celui qui le lit se met à l’épreuve plus qu’il ne l’y met… »


Joseph de Courbeville.