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les demi-civilisés

que son petit corps se moula sur le mien de la tête aux pieds.

— Max, me dit-elle, je sens que pas un des hommes que j’ai vus ne possède une âme comme la tienne. Je t’adore avec toutes tes pensées, toutes tes émotions, tous les mouvements de ton esprit et toutes les harmonies de ton être. Tu es mon père, ma mère, mon frère, ma sœur, mon enfant, mon tout et davantage. Je me fais une idée si grande de toi que la pire déception de ma vie serait de te trouver, un jour, inférieur à elle.

— Petite Dorothée, je ne puis pourtant pas être à la hauteur d’un dieu.

— Oui, tu dis bien, un dieu. J’ai besoin d’un dieu terrestre à mes côtés, un dieu tangible à qui je vouerai un culte éternel.

Je murmurai, comme me parlant à moi-même :

— On n’est parfait que par la pensée et par l’amour. Tu comprends la grandeur de cet idéal.

— Penser, aimer ! Puis agir suivant sa pensée et suivant son amour. Toute la vie est là. Si tu t’en tiens à ces deux fonctions, qui sont le principe de toute conception intelligente et de toute action élevée, je ne cesserai jamais de t’aimer. Quoi qu’il advienne, je me confondrai avec toi comme la chaleur avec la lumière. Tes infidélités mêmes ne me détourneraient pas de toi, car je saurais que les accidents de l’existence n’affecteraient par l’essence de ton être. Si tu as la force de mépriser les conventions et les préjugés qui étouffent la