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INDES ORIENTALES.

mettoit, à leur demander en ſon langage moitié Portugois, & moitié Moreſque, qui d’entre eux entretenoit des garces, & ayant deſcouuert aucuns qui en nourriſſoyent trois ou quatre, il les prioit, & neantmoins leur commãdoit d’en laiſſer au moins vne, & qu’ils ſe pourroyẽt bien contenter des autres : mais il reuenoit ſi ſouuẽt à ceſte ſaincte pratique, qu’en quinze ou vingt iours, leur en arrachant tantoſt vne, & puis vne autre, il leur oſtoie à la parfin gratieuſement toutes ces vileines abandonnees, & feit tant par ce moyen qu’il feit deſloger neuf ou dix concubines de la maiſon d’vn homme du païs. Or quand il rencontroit des gens veautrés en ceſt ord & vilein peché, il tenoit ceſte maniere de proceder auec eux, de leur monſtrer d’entree toute douceur & familiarité, auec vn viſage gratieux & plaiſant, & parfois luy meſme ſe conuioit de manger & boire auec eux, & quand il auoit ainſi par beaux & honeſtes moyens gaigné leur cœur, il en faiſoit tout ce qu’il vouloit, & ceux cy guaris de leur vice, il s’adreſſoit à d’autres, & par ceſte ſienne ſi adroite façon, Dieu luy feit la grace de conuertir à bien faire pluſieurs qui eſtoyent abiſmés en vice, de ſorte que ceux qui l’ont cogneu, diſent, qu’il a plus faict de fruict par ſes colloques familiers, que par ſes exhortations, & predications publiques.