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ii
SUITE DES CRIMES.

Et voilà ce malfaiteur !

Et l’on ne t’applaudirait pas, ô Vérité, quand aux yeux de l’Europe, aux yeux du monde, en présence du peuple, à la face de Dieu, en attestant l’honneur, le serment, la foi, la religion, la sainteté de la vie humaine, le droit, la générosité de toutes les âmes, les mères, les femmes, les sœurs, la civilisation, la liberté, la République, la France, l’avenir, devant ses valets, son sénat et son conseil d’État, devant ses généraux, ses prêtres et ses agents de police, toi qui représentes le peuple, car le peuple, c’est la réalité ; toi qui représentes l’intelligence, car l’intelligence, c’est la lumière ; toi qui représentes l’humanité, car l’humanité c’est la raison ; au nom du peuple enchaîné, au nom de l’intelligence proscrite, au nom de l’humanité violée, devant ce tas d’esclaves qui ne peut ou qui n’ose dire un mot, tu soufflettes ce brigand de l’ordre !

Ah ! qu’un autre cherche des mots modérés. Oui, je suis net et dur, je suis sans pitié pour cet impitoyable, et je m’en fais gloire.

Poursuivons.

À ce que nous venons de raconter ajoutez tous les autres crimes sur lesquels nous aurons plus d’une occasion de revenir, et dont, si Dieu nous prête vie, nous raconterons l’histoire en détail. Ajoutez les incarcérations en masse avec des circonstances féroces, les prisons regorgeant[1], le séquestre[2] des biens des proscrits dans dix départements, notamment dans la Nièvre, dans

  1. Le Bulletin des lois publie le décret suivant en date du 27 mars :

    « Vu la loi du 10 mai 1838, qui classe les dépenses ordinaires des prisons départementales parmi celles qui doivent être inscrites aux budgets départementaux ; « Considérant que tel n’est pas le caractère des dépenses occasionnées par les arrestations qui ont eu lieu à la suite des événements de décembre ;

    « Considérant que les faits en raison desquels ces arrestations se sont multipliées se rattachaient à un complot contre la sûreté de l’État, dont la répression importait à la société tout entière, et que dès lors il est juste de faire acquitter par le trésor public l’excédent de dépenses qui est résulté de l’accroissement extraordinaire de la population des prisons, décrète :

    « Il est ouvert au ministère de l’intérieur, sur les fonds de l’exercice 1851, un crédit extraordinaire de 250 000 francs, applicable au payement des dépenses résultant des arrestations opérées à la suite des événements de décembre. »

  2. « Digne, le 5 janvier 1852 : « Le colonel commandant l’état de siège dans le département des Basses Alpes, « Arrête : « Dans le délai de dix jours, les biens des inculpés