Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome I.djvu/444

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de ce qui pouvait ouvrir les yeux au peuple ; je dictai la proclamation suivante :

PROCLAMATION

« Peuple ! on te trompe.

« Louis Bonaparte dit qu’il te rétablit dans tes droits et qu’il te rend le suffrage universel.

« Louis Bonaparte en a menti.

« Lis ses affiches. Il t’accorde, quelle dérision infâme ! le droit de lui conférer à lui, à lui SEUL, le pouvoir constituant, c’est-à-dire la suprême puissance qui t’appartient. Il t’accorde le droit de le nommer dictateur POUR DIX ANS. En d’autres termes, il t’accorde le droit d’abdiquer et de le couronner ; droit que tu n’as même pas, ô peuple, car une génération ne peut disposer de la souveraineté de la génération qui la suivra.

« Oui, il t’accorde à toi, souverain, le droit de te donner un maître, et ce maître, c’est lui.

« Hypocrisie et trahison !

« Peuple, nous démasquons l’hypocrite, c’est à toi de punir le traître ! »

« Le comité de résistance :

« Jules Favre – de Flotte – Carnot – Madier de Montjau – Mathieu (de la Drôme) – Michel (de Bourges) – Victor Hugo. »

Baudin était tombé héroïquement. Il fallait faire connaître au peuple sa mort et honorer sa mémoire. Le décret qu’on va lire fut voté sur la proposition de Michel (de Bourges) :

DÉCRET

« Les représentants du peuple restés libres, considérant que le représentant Baudin est mort sur la barricade du faubourg Saint-Antoine pour la République et pour les lois, et qu’il a bien mérité de la patrie,

« Décrètent :

« Les honneurs du Panthéon sont décernés au représentant Baudin.

« Fait en séance de permanence, le 3 décembre 1851. »

Après les honneurs aux morts, et les nécessités du combat, il importait, selon moi, de réaliser immédiatement et dictatorialement quelque grande amélioration populaire. Je proposai l’abolition des octrois et de l’impôt des boissons. On fit cette objection : – Pas de caresse au peuple ! après la victoire, nous verrons. En attendant, qu’il combatte ! S’il ne combat pas, s’il ne se lève pas, s’il ne comprend pas que c’est pour lui, que c’est pour