Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome II.djvu/158

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eu occasion de faire la même question que Cournet, j’ai obtenu de trois habitants de Bruxelles les trois réponses que voici :

— C’est un chien.

— C’est une fouine.

— C’est une hyène.

Il y a probablement dans ces trois réponses quelque exagération.

Un quatrième belge, sans spécifier, s’est borné à me dire :

— C’est une bête.

Au point de vue des fonctions publiques, M. le baron Hody était ce qu’on appelle à Bruxelles l’administrateur de la sûreté publique, c’est-à-dire une contrefaçon du préfet de police, un peu Carlier, un peu Maupas. Grâce à M. le baron Hody, qui a depuis quitté cette place, et qui du reste était, comme M. de Montalembert, un « simple jésuite », la police belge, à ce moment-là, était un composé de police russe et de police autrichienne. J’ai lu d’étranges lettres confidentielles de ce baron Hody. Action et style, rien de plus cynique et de plus hideux que les polices jésuites quand elles laissent voir leurs trésors secrets. Ce sont des effets de soutane déboutonnée.

A l’époque dont nous parlons (décembre 1851), le parti clérical s’étant rallié à toutes les formes du monarchisme, ce baron Hody confondait sous le niveau de sa protection l’orléanisme avec la légitimité. Je raconte. Rien de plus.

— Le baron Hody, soit, dit Cournet.

Il se leva, s’habilla, se brossa comme il put, et demanda à l’hôte :

— Où est la police ?

— A la justice.

Cela, en effet, est ainsi dans Bruxelles, l’administration de la police fait partie du ministère de la justice, ce qui ne relève pas beaucoup la police et abaisse un peu la justice.

Cournet se fit conduire et arriva jusque devant ce personnage.

M. le baron Hody lui fit l’honneur de lui demander fort sèchement :

— Qui êtes-vous ?

— Un réfugié, répondit Cournet. Je suis de ceux que le coup d’État a chassés de Paris.

— Votre état ?

— Ancien officier de marine.

— Ancien officier de marine, reprit le baron Hody, d’un son de voix fort radouci ; avez-vous connu son altesse royale monseigneur le prince de Joinville ?

— J’ai servi sous lui.