Page:Jules Verne - L’Île mystérieuse.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
125
les naufragés de l’air.

« Ne vous faut-il pas un instrument analogue à celui qui vous a servi hier ? demanda Harbert à l’ingénieur.

— Non, mon enfant, répondit celui-ci, nous allons procéder autrement, et d’une manière à peu près aussi précise. »

Harbert, aimant à s’instruire de toutes choses, suivit l’ingénieur, qui s’écarta du pied de la muraille de granit, en descendant jusqu’au bord de la grève. Pendant ce temps, Pencroff, Nab et le reporter s’occupaient de divers travaux.

Cyrus Smith s’était muni d’une sorte de perche droite, longue d’une douzaine de pieds, qu’il avait mesurée aussi exactement que possible, en la comparant à sa propre taille, dont il connaissait la hauteur à une ligne près. Harbert portait un fil à plomb que lui avait remis Cyrus Smith, c’est-à-dire une simple pierre fixée au bout d’une fibre flexible.

Arrivé à une vingtaine de pieds de la lisière de la grève, et à cinq cents pieds environ de la muraille de granit, qui se dressait perpendiculairement, Cyrus Smith enfonça la perche de deux pieds dans le sable, et, en la calant avec soin, il parvint, au moyen du fil à plomb, à la dresser perpendiculairement au plan de l’horizon.

Cela fait, il se recula de la distance nécessaire pour que, étant couché sur le sable, le rayon visuel, parti de son œil, effleurât à la fois et l’extrémité de la perche et la crête de la muraille. Puis il marqua soigneusement ce point avec un piquet.

Alors, s’adressant à Harbert :

« Tu connais les premiers principes de la géométrie ? lui demanda-t-il.

— Un peu, monsieur Cyrus, répondit Harbert, qui ne voulait pas trop s’avancer.

— Tu te rappelles bien quelles sont les propriétés de deux triangles semblables ?

— Oui, répondit Harbert. Leurs côtés homologues sont proportionnels.

— Eh bien, mon enfant, je viens de construire deux triangles semblables, tous deux rectangles : le premier, le plus petit, a pour côtés la perche perpendiculaire, la distance qui sépare le piquet du bas de la perche, et mon rayon visuel pour hypoténuse ; le second a pour côtés la muraille perpendiculaire, dont il s’agit de mesurer la hauteur, la distance qui sépare le piquet du bas de cette muraille, et mon rayon visuel formant également son hypoténuse, — qui se trouve être la prolongation de celle du premier triangle.

— Ah ! monsieur Cyrus, j’ai compris ! s’écria Harbert. De même que la dis-