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Il existe, en effet, différentes couches superposées de langages, comme il existe différentes couches géologiques, et il y a différentes zones de dialectes, comme il y a différentes zones climatériques où s’étalent et se disposent, dans leurs transitions infinies, les richesses innombrables de la flore et de la faune auxquelles elles correspondent.

Pour pouvoir imaginer un langage toujours le même, il faudrait lui ôter ses qualités de plasticité et de souplesse, l’isoler de tous les autres, le circonscrire à une localité d’où il ne pourrait jamais sortir et l’immobiliser dans une courte période de temps, en obtenant en sa faveur, du vieux Saturne, qu’il arrête sa marche en avant.

Il faudrait imaginer l’impossible et l’absurde et concevoir des fonctions et des organes en dehors de toute évolution.

Le changement est donc fatal et nécessaire dans le domaine de la parole, qui est celui même de la pensée, et plus ce changement s’opère rapidement, plus le langage montre posséder des caractères de viabilité et de perfectibilité.

C’est le cas du Wallon qui change sans cesse topographiquement et chronologiquement, de quoi nous ne pouvons que l’en féliciter.

Si le dialecte du Luxembourg diffère de celui de Spa et de Malmedy, si celui de Mons et du Borinage n’est pas le même que celui de Charleroi, et si ces derniers se différencient des patois de Liège et de Verviers, cela est dû à la distance des milieux dans lesquels le type général, homogène ou bigarré, par les qualités propres et inhérentes à chaque groupe de population, tend à s’individualiser et à constituer autant de types différents qu’il y aura de stations linguistiques bien définies.

De même, si les patois tels qu’on les parle aujourd’hui dans toutes ces régions diffèrent essentiellement des