Page:Lévy-Bruhl - Revue philosophique de la France et de l’étranger, 88.djvu/6

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
2
revue philosophique


Bien que privé de ces diverses parties, l’étendue du domaine biologique demeure encore considérable, et l’on ne saurait l’embrasser d’un coup d’œil ni le caractériser d’un mot. Si les disciplines qui le constituent conservent entre elles, en etfet, une grande cohésion, elles différent cependant quant à leurs méthodes d’investigation, toutes néanmoins poursuivent un but commun, qui est la connaissance des organismes vivants ; toutes, par conséquent, sont, avant tout, des sciences descriptives. L’anatomiste qui examine les formes extérieures et les dispositions internes se borne forcément à les décrire, et le physiologiste qui étudie le mode de fonctionnement des organes n’est encore qu’un descripteur. Même lorsqu’ils comparent des organismes distincts, l’anatomiste et le physiologiste ne cessent d’être descripteurs. Tous les aperçus de Cuvier, si importants soient-ils, ne sortent pas du cadre de l’anatomie pure la sériation des organismes suivant leur degré de complication appartient strictement au domaine spécial de la morphologie ; les relations fonctionnelles des parties dépendent de la physiologie descriptive l’essence des phénomènes échappe entièrement, elle n’entre qu’accessoirement dans la préoccupation des descripteurs.

Parfois, sans doute, ils tirent de, leurs descriptions des considérations sur l’origine des êtres ou sur la valeur relative des faits qu’ils étudient. Procédant ainsi, ils abandonnent leur point de vue particulier et se placent à un point de vue plus général. Seulement. ils le font d’une manière fréquemment abusive, car les éléments d’un seul ordre qu’ils possèdent ne leur permettent pas un contrôle rigoureux des interprétations ; s’ils tombent juste, c’est une pure question de chance.

Très souvent, d’ailleurs, ces considérations d’ensemble reposent sur une confusion, qui consiste à croire qu’il suffit de décrire des faits communs a tous les organismes ou à un grand nombre d’entre eux pour passer’de la description a l’explication, du particulier au général. Or une discipline ne devient explicative qu’à la condition de sortir d’eUe-même, de faire appel à toutes les autres. La Biologie science de synthèse, la Biologie générale, n’est plus alors ni morphologique, ni physiologique ; elle part de données concrètes que lui fournit une analyse précise et sûre, pour aboutir à connaître la valeur relative et la signification profonde des phénomènes vitaux ;