LA DISCUSSION SCIENTIFIQUE DU CORSET
Par le Dr TOULOUSE
MÉDECIN EN CHEF DE L’ASILE DE VILLEJUIF, DIRECTEUR DU LABORATOIRE DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE A L’ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES
LA question du corset est l’une des plus mal connues. Comme toutes les choses très familières, le corset a été mal étudié parce que chacun avait à son sujet une opinion assurée, basée sur l’observation courante et qui le dispensait d’ un examen plus approfondi. Médecins, hygiénistes, physiologistes se sont contentés durant longtemps d’impressions, d’observations superficielles. Le sentiment s’en est mêlé, et le corset est devenu objet de litige. Des ligues se sont formées. On a condamné le corset sans appel, en le chargeant de mille maux. Les femmes renseignaient mal sur ce sujet de leur compétence. Celles qui pouvaient se passer de ce soutien ou qui ne voyaient que la question d’hygiène s’enrôlaient volontiers dans le camp des iconoclastes, où les idoles à briser étaient des mannequins étroitement corsetés. Les autres qui ne craignaient pas de sacrifier beaucoup à la mode, pour avoir une silhouette plus séduisante se contentaient de sourire |
un peu énigmatiquement, considérant cette question comme hors du champ des réformes possibles, entouscas comme une de celles que les hommes ne sauraient discuter sans outrecuidance. Comment, pensera-t-on, être embarrassé par une question aussi simple? C’est qu’elle n’est simple qu’en apparence. Ainsi le corset est accusé de favoriser chez les jeunes filles les déviations de la colonne vertébrale, la scoliose notamment, parce qu’il immobilise les muscles du tronc qui, s’affaiblissant, laissent les déviations se produire à l’occasion d’attitudes défectueuses, surtout à l’occasion de l’écriture. Or, des médecins prescrivent le corset comme moyen orthopédique et pour corriger les déviations naturelles de l’échine. Voilà deux opinions, contradictoires, également admissibles. Est-il vraisemblable qu’on ne puisse pas tirer au clair par la simple observation le bien-fondé de l’une ou de l’autre opinion? Hé! non; car l’observation ne donne pas des éléments bien certains. La coexistence du cor- |