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tion, commença à se rendre odieux à tout le royaume.

Les mandarins et les grands, irrités d’un procédé qui leur donnait lieu de craindre à tout moment pour eux-mêmes, conspirèrent en secret contre le nouveau ministre, et se proposèrent de le perdre auprès du roi ; mais il n’était plus temps, il disposait si fort de l’esprit du prince, qu’il en coûta la vie à plus de trois cents d’entre eux, qui avaient voulu croiser sa faveur. Il sut ensuite si bien profiter de sa fortune et des faiblesses de son maître, qu’il ramassa des richesses immenses, soit par ses concussions et par ses violences, soit par le commerce dont il s’était emparé, et qu’il faisait seul dans tout le royaume. Tant d’excès, qu’il avait pourtant toujours colorés du prétexte du bien public, avaient soulevé tout le royaume contre lui ; mais personne n’osait encore se déclarer. Ils attendaient une révolution que l’âge du roi et sa santé chancelante leur faisaient regarder comme prochaine.

Constance n’ignorait pas leur mauvaise disposition à son égard ; il avait trop d’esprit, et il connaissait trop les maux qu’il leur avait faits pour croire qu’ils les eussent oubliés. Il savait d’ailleurs mieux que personne combien peu il avait à compter sur la faible constitution du prince ; il connaissait aussi tout ce qu’il avait à craindre d’une révolution, et il comprenait bien qu’il ne s’en tirerait jamais, s’il n’était appuyé d’une puissance étrangère qui le protégeât