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mer. Notre second ambassadeur, le plus robuste et le plus habile des trois à nager, était déjà dans l’eau. Il s’était chargé de la lettre du roi, qu’il portait attachée à la poignée d’un sabre dont sa majesté lui avait fait présent. Ainsi nous arrivâmes tous deux à terre presque en même temps. Plusieurs Portugais s’y étaient déjà rendus ; mais ils n’avaient fait que changer de péril. Si ceux qui étaient encore dans le vaisseau pouvaient être noyés, il n’y avait pas plus de ressource à terre contre la faim. Nous étions sans eau, sans vin et sans biscuit. Le froid était d’ailleurs très-piquant, et j’y étais d’autant plus sensible, que la nature ne m’y avait point accoutumé. Je compris qu’il me serait impossible d’y résister long-temps. Cette idée me fit prendre la résolution de retourner le lendemain au vaisseau pour y prendre des habits plus épais que les miens, et des rafraîchissemens. Les Portugais de quelque rang avaient été logés sur le premier pont ; et je m’imaginai que je trouverais dans leurs cabanes des choses précieuses, surtout de bonnes provisions, qui étaient le plus nécessaire de nos besoins. Je me remis sur une espèce de claie, et je nageai heureusement jusqu’au vaisseau.

» Il ne me fut pas difficile d’y aborder, parce qu’il paraissait encore au-dessus de l’eau. Je m’étais flatté d’y trouver de l’or, des pierreries, ou quelque meuble précieux qui n’eût pas été difficile à porter. Mais, en arrivant, je vis toutes les chambres remplies d’eau, et je ne pus em-