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LES PÉRIODES VÉGÉTALES
DE L’ÉPOQUE TERTIAIRE.

(Suite. — Voy. p. 170 et 186.)
§V. — Période pliocène.

Le Callitris Brongniartii, que nous avons signalé dans l’éocène, et qui joue un rôle si considérable dans les gypses d’Aix persiste à se montrer, entouré du même cortège de Cinnamomum ou camphriers.

Le Séquoia Langsdorfii, le Carpinus grandis, le Dryandroides lignitum, l’Acer trilobatum, le Sapindus falcifolius, les Podogonium, l’Acacia parschlugiana et bien d’autres espèces que je pourrais citer attestent la permanence des mêmes types, dans un âge déjà postérieur à celui d’Œningen. Il est vrai qu’on ne saurait signaler aucun palmier dans la flore sarmatique, mais nous avons fait voir que ces végétaux étaient déjà fort rares à Œningen. Rien donc ne dénoterait ici de prochains changements, si l’on ne remarquait, auprès de Vienne, la présence répétée de certaines formes, apparemment douées d’une vitalité plus robuste que d’autres et qui, déjà présentes ou abondantes dès le miocène, sont destinées à prolonger leur existence jusqu’au milieu ou même jusqu’à la fin de la période suivante. Ce sont avant tout : Glyptostrobus europœus, Br., Betula prisca, Ett., Planera Ungeri, Ett., Liquidambar europœum, Al. Br., Platamus aceroides, Gœpp., Parrotia pristina, Ett., Grewia crenata, Ung., Acer Ponzianum, Gaud., A. integrilobum, O. Web., etc.… La plupart d’entre eux ont été figurés précédemment ; je donne ici la représentation de celles qui ne l’ont pas été, et le lecteur doit s’attendre à les retrouver toutes, en remontant la série (fig. 2).

La flore qui succède immédiatement à celle de l’étage sarmatique, dans le bassin de Vienne, celle des couches à congéries, permet de constater plusieurs changements : le Callitris et les camphriers ne se montrent plus, les Acacias sont absents ; ces types ont quitté pour toujours notre sol, mais on observe encore celui des Séquoia et, sous le nom de Phragmites, on trouve de vrais bambous ; favorisés sans doute par l’humidité du climat qui tend à s’accroîtra, nous les verrons persister, associés à nos roseaux, et faire un peu plus tard l’ornement des flores certainement pliocènes de Meximieux et du Cantal. Sur l’horizon des couches à congéries, on voit apparaître aussi, plus fréquemment que dans le miocène proprement dit, le hêtre, non pas précisément notre hêtre, Fagus sylvatica, mais un type très-voisin de lui qui s’étend et se propage de toutes parts et qui atteste, par cette extension même, l’influence de l’humidité, si nécessaire à la prospérité de cette essence forestière (fig. 3).

En Italie, on doit rapporter à un niveau à peu près équivalent à celui des couches à congéries, les flores de Stradella, près de Ravie, et de Senigaglia, dans les Marches ; elles dénotent les mêmes combinaisons, en laissant voir plus d’élévation dans la température, à raison de la position plus méridionale de ces deux localités. Les gypses de Stradella montrent l’association du camphrier miocène, Cinnamomum polymorphum, Hr., avec le hêtre, Fagus attenuata, Gœpp., le Charme et divers Érables pliocènes. À Senigaglia, dont la flore est d’une grande richesse, non-seulement les palmiers ont laissé des vestiges certains ; mais on observe de plus, à côté de certains types miocènes, comme les Séquoia Stembergii et Langsdorfii, le Libocedrus salicornioides, le Taxodium dubium, Gœpp., le Sapindus falcifolius, etc., dont la présence ne saurait être douteuse, des formes de chênes, d’érables, d’ormes, de charmes, de hêtres, de noyers, intimement alliées à celles qui peupleront le pliocène et par celles-ci à des espèces encore vivantes. La flore de Senigaglia est riche également en formes végétales communes aux deux périodes et que nous devons citer comme caractérisant aussi bien le pliocène que le miocène ; ce sont principalement les suivantes : Glyplostrobus europœus, Ilr., Salisburia adiantoides, Ung. (fig. 4), Planera Ungeri, Ett., Platanus aceroides, Gœpp., Liquidambar europœum, Al. Br., Sassafras Ferretianum, Massal., Oreodaphne Heerii, Gaud., Liriodendron Procaccinii, Ung., Tilia mastaiana, Massai., Juglans bilinica, Ung., Cercis Virgiliana, Massai., etc. (fig. 5)[1]. Ces espèces et bien d’autres que l’on pourrait citer, non-seulement persistèrent en Europe par delà l’âge miocène où l’on commence à les rencontrer, mais elles présentent encore des correspondants directs au sein de la nature actuelle. Ces correspondants sont presque tous, il est vrai, situés hors de l’Europe et plusieurs très-loin de ce continent, en Amérique, comme le Tulipier et le Sassafras ; en Chine ou au Japon, comme le Ginkgo et le Glyptostrobus ; d’autres aux Canaries, Oreodaphne, ou dans l’Asie occidentale, Platane, Planère, Liquidambar. Le plus petit nombre (Cercis, Acer) est demeuré européen ; mais en dépit de cette dispersion, la parenté est si étroite entre les formes restées si longtemps indigènes, si tardivement éliminée de notre sol, et leurs homologues de la nature vivante, qu’il est impos-

  1. Parmi les espèces mio-pliocènes de Senigaglia, que représentent nos figures 4 et 5, il faut remarquer les deux chênes, Quercus Fallopiana et Cornaliœ (fig. 5, 1-2) et l’Acer Cornaliœ (fig. 4, 4). Le Q. Fallopiana reproduit le type de nos robur : le Q. Cornaliœ, au contraire, se rattache de très-près au type infectoria. Quant à l’Acer Cornaliœ il appartient évidemment au groupe de l’Acer opulifolium, Vill.